1440 minutes

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editions d'autre part

lundi 17 octobre 2011

posé mon cul

maintenant c’est l’heure de la conquête
la plus abrupte et la plus iconoclaste
ce trottoir ce bout de trottoir est à moi
il sait tout de ma vie
de ma joie et de mes écorchures
c’est ici que j’ai soutenu le plus beau regard
le plus trouble et le plus vorace
c’est ici que j’ai soudoyé le plus tonitruant poème
le plus arythmé et le plus défolié
c’est ici que j’ai posé mon cul
sur un destin rigolard et sans fard

maintenant c’est l’heure de l’enlèvement
le plus inavouable et le plus iconoclaste
ce trottoir est mien
jusqu’au bout du caniveau
jusqu’au perron de granit
il sait mes balafres
mes achats et mes aumônes
c’est ici que j’ai caressé les plus beaux corps
les plus comédiens et les plus argileux
c’est ici que j’ai mangé les fruits les plus goûteux
les plus colorés et les plus asiates
c’est ici que j’ai posé mon cul
sur des rapports infâmes et vénaux

maintenant c’est l’heure de la rupture
la plus déraisonnable et la plus iconoclaste
ce trottoir mon trottoir
celui de mon permis de séjour
de ma généalogie
il est de mes démesures
de mes excès et de mes libertés
c’est ici c’est bien ici
que j’ai bu la liqueur la plus effroyable
la plus sauvage et la plus ambrée
c’est bien ici que j’ai épousé la plus femme
la plus pour le moins et pour le tout
c’est ici que j’ai posé mon cul
sur les promesses souriantes et inutiles

maintenant c’est l’heure de la rançon
la moins gratuite et la plus iconoclaste
ce trottoir mien et tout à moi
est celui où je peux m’affaler sans supplice
il sait mes articulations
mes raideurs et mes refus
c’est précisément ici et jamais ailleurs
que j’ai donné mon salive la plus salée
la plus vive et la plus vraie
que j’ai lâché certains de mes liquides
les plus précieux et les plus privés
c’est ici que j’ai posé mon cul
sur les années trop nécessaires et comptables

maintenant c’est l’heure de la balance
la plus torve et la plus iconoclaste
ce trottoir quel trottoir quel est son propriétaire
celui que j’arpente et que je déserte
il sait mes fantômes
mes irruptions et mes fuites
ce devait être ici justement ici
que je devais rencontrer ma vie la plus nue
la plus brûlante et la plus droite
ici que je devais connaître les horaires et les tarifs
les plus inabordables et les plus interlopes
ici qu’il ne me restait qu’à poser mon cul
sur un cheval à bascule et un faux requiem

17 octobre 2011


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