1440 minutes

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editions d'autre part

vendredi 31 octobre 2014

dessiner le visage de la paysanne


la table de jardin sous le givre
le grabuge des fins de vendanges
la crucifixion de l’étourneau
la tisanière qui renonce
et la trompe marine dans le verger
 
scarifier les pieds de choux
ajourner la permission de soleil
dessiner le visage de la paysanne
 
que vienne du cellier un chant de béatitude

 

jeudi 30 octobre 2014

baiser la dompteuse de fennecs


l’enveloppe affranchie de millepertuis
le cachet de cire au goût de pâte de coing
le papier buvard imbibé de lavande
le bec de plume sans adresse
le pèse-lettre sans mémoire
 
exiger un droit de réponse du désert
désarmer l’imbécillité de l’outre
baiser la dompteuse de fennecs sur la dune
 
que vienne un déshabillé de constellation dans un ciel d’hiver

mardi 28 octobre 2014

valser avec le sabot de la bergère


 
la bronchite de l’accordéon
le bras cassé de la trompette
la rustine sur le tambour
l’arc électrique sur la portée
et le ver à soie sur la corde vocale
 
rendre gorge devant l’écharpe du mouton
sabrer la peluche du loup
et valser avec le sabot de la bergère
 
que vienne le paquebot des fiançailles

lundi 27 octobre 2014

rhabiller la faucheuse d'orties


la dépigmentation des peaux de lézards
le buvard des ailes de cormorans
la soie des prières carmélites
les escarres de la truie allaitant
et le maquillage de la chienne pistant le rouge
 
appréhender le hibou des marais
foutre le feu au tapis de feuilles mortes
rhabiller la faucheuse d’orties après l’amour
 
que vienne l’indulgence pour le péché à commettre

dimanche 26 octobre 2014

capturer l'équarrisseuse avant la nuit


la décollation d’une libellule rousse
la corrosion des pinces du lucane
l’amputation manquée du mille-pattes
la strangulation de l’orvet
et la trachéotomie du rossignol
 
brancarder l’agneau de l’année
défenestrer les remords
capturer l’équarrisseuse avant la nuit
 
que vienne l’incendie des lamentations

samedi 25 octobre 2014

saluer la gardienne d'araignées


le doute de la fermentation des pommes
le tictac du chagrin
la veuve devant son miroir
la crucifixion du machaon
et l’incendie du séchoir à lavandes
 
désinfecter l’armoire à souvenirs
tricoter des pivoines
saluer la gardienne d’araignées
 
que vienne le repos du ventre

vendredi 24 octobre 2014

embrasser la factrice


la mise à feu des noyers
le pirouli des fifres
la couleuvre dans son nœud coulant
le psaume en pièces détachées
et la tache de vin rouge sur la chemise
 
repeindre le volet de la chambre
préparer une compotée de grives
embrasser la factrice
 
que vienne le premier gel d’octobre


mardi 21 octobre 2014

signal de contrition


c’est un signal de fin de vie sur le monitoring de la retraite
c’est un signal de contrition pendant la sieste du dimanche
c’est un signal d’arrêté urgent pour le défraiement des étrennes
c’est un signal de laisser-passer pour les guerres et les virus
 
l’étoile du berger éclaire la piste du loup
la lampe-torche signale l’effondrement du chemin
la caméra infrarouge surprend les pérégrinations des sexes
le falot-tempête se faufile parmi les granges
 
on arraisonne un convoi de céréales
on engraisse le veau avec des prières et des promesses
on collecte des galets pour la fronde de la sentinelle
on suçote des petits verres de gnôle pour désinfecter le remords
 
le vent siffle sous le toit un oratorio de froidure
la belette se calfeutre dans la malle aux chandails
le fourneau réclame sa part de tourteau et de bûche
le courrier du cœur attend la première gelée
 
la courbe des températures sur le carnet du lait
la marque des apnées sur la planche à dessin
le diamètre des soirs de bal et des matins de séparation
l’angle mort des amours sur l’équerre des caresses
 
le signal d’une pulsion de vie sur le catalogue des gratitudes
j’épouserai la secouriste et ses remèdes de bonne femme

jeudi 16 octobre 2014

abside déroutée


c’est une abside entre le pariétal et l’hippocampe
c’est une abside posée sur le rebord du dimanche
c’est une abside entre la pâque et le grand soir
c’est une abside agrippée à la planche de salut
 
des mots devant la cage des inséparables
une phrase torturée sur l’autel d’un ingrat
un chapitre sans accroche, sans police ni caractère
le grand livre en jachère au bout du cimetière
 
on lâche des cerfs-volants ans un ciel de défaite
on pratique le brûlis lors des fêtes votives
on ensemence la tourbe avec des fleurs cannibales
on éduque les renards à traverser les routes
 
la tremblante du mouton et la fièvre du chien berger
l’épilepsie de la fourmilière et l’infarctus du torcol
la gangrène du millepatte et la confusion de l’orvet
la psychose du taureau et le désœuvrement de la vache
 
à quoi sert une abside dans la mesure du chagrin ?
une brouette de feuilles et une pelletée de fumier
un accordéon malingre pour le bal des renoncules
une assiettée de silence au déjeuner du diable
 
l’abside déroutée vers les méninges du grand nord
j’épouserai la vieille monarque dans ses tentures, et son accent de toundra

mercredi 15 octobre 2014

chorégraphie de caresses


c’est une chorégraphie ruinée au bal des musaraignes
c’est une chorégraphie de fétuques dans le brouhaha de midi
c’est une chorégraphie d’étourneaux sur la page du ciel
c’est une chorégraphie de caresses dans une envie de communion
 
le cognassier remonte vers le talus plein nord
il abandonne ses fruits à l’amoureuse gourmande
le frêne se déshabille comme une amoureuse aveugle
il trie le courrier du cœur des écureuils désemparés
 
on aborne le pré de foire aux consolations
on balise le chemin de croix du gibier
on enchaîne le portail des pluies tropicales
on ficelle le vent avec des foulards de soie pourpre
 
un enfant lance des châtaignes contre la fenêtre de l’école
il noie une punition dans l’eau sale du torrent
la voisine cueille des fèves pour le renfort de la soupe
elle crache une vilenie contre un rouge-gorge effronté
 
fermentation des chagrins
distillation des promesses
macération de la déprime
pressée du désarroi
 
la chorégraphie de la destinée sur un papier d’identité
j’épouserai la fonctionnaire à l’utérus périmé

lundi 13 octobre 2014

pluie hébétée


c’est une pluie qui outrage et déparasite les nécessiteux
c’est une pluie qui remonte les travées de la Toussaint
c’est une pluie hébétée qui brise le miroir des nénuphars
c’est une pluie délavée du souvenir des morts
 
l’angélus de midi à portée de la soupe
la tournée du facteur rompue par la ravine
le faux-pas de l’horloger sur le trottoir de l’heure d’hiver
l’escargot qui s’accroche à la tige du chagrin
 
on détourne les vendangeuses vers les plages de galets
on fait griller les marrons sur les feux de l’amour
on dessale le petit lard au verjus de muscat
on paie le muletier d’un ragout de grives
 
qui crie vers le pressoir ? qui chante dans la cuve ?
des enfants jouent aux billes avec des noix et des raisins
des filles maquillent leurs lèvres avec des grappes de grenache
à quelle heure fermentent les cervelles ?
 
la vieille engrosse le torrent en pissant sa rancœur
sa chienne renifle entre les jambes du contremaître
le jardin des choux à choucroute se morfond de l’horoscope
un pinson s’est fracassé contre le vitrail de la chapelle
 
la pluie efface les aspérités et les accroches
j’épouserai la condamnée pour vol par métier de serrures et de secrets

samedi 11 octobre 2014

moignon velcro


c’est un moignon en bande velcro pour agripper le passant
c’est un moignon en céramique pour remuer la soupe
c’est un moignon armé d’une fronde pour repousser les vautours
c’est un moignon d’âme enfantine pour pêcher la miséricorde
 
la médecine se recroqueville devant la machette
le puits de l’espérance est empoisonné de pitié
la toge de coton blanc et le vaccin périmé
une injustice de savane, une plaidoirie de hyène
 
on greffe des diamants sur les ongles des sorcières
on brûle des jachères de manioc pour des céréales à bestiaux
on vend des jerricanes d’eau croupie au prix du diesel
on égorge des poulets, des gazelles et des filles nubiles
 
le soleil est rustre sur les tôles en fer blanc
le buffle pourrit sur pied dans la vase
la génératrice a explosé dans le dispensaire
même le serpent ingrat fuit cette désolation
 
un moignon applaudit
un œil mort sourit
une bouche vide prie
une panse gonfle comme une voile
 
des moignons s’entrechoquent comme des becs de cigognes
j’épouserai la mère du chamane aux seins flasques et scarifiés

samedi 4 octobre 2014

pomme en équilibre


c’est une pomme oubliée, propriété d’un merle farouche
c’est une pomme en attente d’une caresse de femme
c’est une pomme en équilibre sur le manche d’un couteau
c’est une pomme pourrissante sur l’étagère du goûter
 
les bras de la chaise-longue s’allongent vers la prairie
trois brins de fenasses dansent une sardane
un frelon fatigué contrôle son taux de glycémie sur une grappe de raisin
un soleil en bras-de-chemise entre dans une agence de voyage
 
on informe l’étang de l’horaire des migrations
on allume des balises sur les ponts enjambant le canal
on signale au glacier l’interdiction de fuir
on libère un collectif de chauves-souris devant les laboratoires
 
la libraire vend des mille-feuilles de graphite
le photographe tire le portrait des jours de la semaine
le marchand-grainier vend de la progéniture lyophilisée
la perruche bredouille un kyrie eleison
 
le pommier garde ses enfants dans le parc à moutons
il y a un mirador devant l’école, et des projecteurs aussi
des chiens de berger jouent aux osselets en attendant les ordres
la vitrine du dispensaire vante le sport collectif pour les jarrets des jeunes filles
 
la pomme se caramélise sous l’intensité des désirs
j’épouserai la vaccinatrice et sa mallette de seringues