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editions d'autre part

lundi 30 novembre 2009

noeud de cul de porc

Dans un pays bricolé de marais, de talus et de marais, ils avaient fait des lois pour les grenouilles, les veaux, les bénitiers et le sainfoin. Ils étaient très contents de leurs jardinets, de leurs horloges à ressort et de leurs urnes en bois d'arole sculpté. Dieu était assis sur les premières marches de leur constitution. C'était ainsi de toute éternité. Et vraiment il n'y a aucune raison que cela change. L'un deux, et le non moins teigneux, a dit que les grenouilles des Balkans étaient de vilains crapauds, et le sainfoin d'Istanbul de l'herbe aux gueux.

La petite ficelle s'est réveillée dans un nid de vipères, dans un pays peureux, froid et fermé.

Elle avait pourtant servi, colorée et soyeuse, à dessiner le contour d'un pays démocrate sur le mur de la classe. Les enfants avaient bien rigolé quand ils avaient ouvert un passage sud-nord. Avec le même ciseau qui découpait des croix et des croissants.

Dans la même période tranquille et bienheureuse, ils avaient utilisé toute la pelote pour empaqueter des pots de miel pour un ours convalescent. Une discussion un peu virile avec un homme au cerveau éclairé à la bougie avait été stoppée net par une malheureuse balle de policier. Encore une qu'on n'exportera pas dans un pays en guerre. De religion.

De l'homme, on ne sait presque rien. Sinon qu'il a été interrogé et qu'il n'a pas tout boulotté son test de Rorschach. Dans l'indifférence générale, la petite ficelle va l'aider à relier ses neurones.

Au chapitre des morts, un train déraille à cause d'une bombe en Russie faisant trente-neuf morts et une centaine de blessés. En Suisse, des voitures chavirent à cause de la neige. On dénombre au moins un mort. Sur le pouce.

Devant la ferme jappe un chien infidèle. En ce temps de cochonnailles, la petite ficelle fait des nœuds de cul de porc aux saucissons de campagne.

30 novembre 2009

samedi 28 novembre 2009

derrière les arbres nus

derrière les arbres nus
un soleil de banlieue
imprécis et distant
un monde en absence

des femmes et quelques hommes s'impliquent
la liberté est une ronce
la paix est une énigme
et l'âme humaine est barbouillée

derrière la brume mauve
les vignes lie de vin
indolentes et figées
un monde en suspens

des femmes et quelques hommes s'agitent
la liberté est un lierre
la paix est une chimère
et l'âme humaine est confite

derrière le fleuve noir
une route froide
noire et glissante
un monde en instance

des femmes et quelques hommes s'inquiètent
la liberté est belladone
la paix est une fumée
et l'âme humaine est en lambeaux

derrière la place d'arme
un brasero timide
mouillé et fumant
un monde en silence

des femmes et quelques hommes se lamentent
la liberté est en berne
la paix est en loque
et l'âme humaine est dénudée

derrière le nouveau cimetière
un hôpital en jachère
vide et pénitent
un monde à contresens

des femmes et quelques hommes vont en guerre
la liberté est en feu
la paix est en sang
et l'âme humaine est un vieux psaume

derrière mon jardin
un talus de givre
abandonné priant
un monde en vacance

des femmes et quelques hommes se rencontrent
leur liberté est un leurre
leur paix est en jeu
et l'âme humaine est une vieille espérance

like a rolling stone comme disait Robert Allen Zimmerman


28 novembre 2009

samedi 21 novembre 2009

novembre

novembre se tait
écheveau de feuilles
dernière guêpe
raisin gelé

novembre vibre
chant de la cloche
soleil jaune
vol d'étourneaux

novembre à genoux
pieds de choux
monceau de bois
vin nouveau

novembre dort
brume vaporeuse
écorce de verveine
feu qui danse

novembre disparait
poème étourdi
piano de verre
citron et miel

novembre se meurt
soupirs transparents
ta peau brûlante
notre silence

novembre s'abandonne
lanterne discrète
ambre immortelle
notre calice est bu

novembre profond
novembre secret
novembre à refaire

nous le referons

sans gêne ni rapière

21 novembre 2009

vendredi 20 novembre 2009

jouer c'est pas du jeu


il a levé la voix
elle recompte les heures
la vie a pris du poids
tricotant du malheur
jouer à cache-couche
derrière la remise
l'amant fait une retouche
à l'accroc sans reprise

elle criait liberté
il tirait la grenaille
l'enfer est vérité
la jalousie tenaille
jouer à chat pendu
à retrousse-valises
quels fruits sont défendus
pour la belle insoumise

il a baissé les bras
elle pleure doucement
des lendemains de fête
raisonnent à leurs tympans
jouer à pigeon nage
dans une mare d'eau grise
regarder le carnage
sur la gorge promise

elle a fermé la porte
il bave dans un verre
un vrai chagrin l'emporte
dans un éclat de guerre
jouer à la marelle
au bord de la banquise
ranimer la querelle
devant la reconquise

ils ont fermé les yeux
en desserrant les poings
leur amour plein de bleus
le remord cousu main
jouer à qui perd perd
le gros lot c'est la mouise
pour solde d'inventaire
un bonheur qui se brise

20 novembre 2009

dimanche 15 novembre 2009

un mot qui manque

à tes yeux je serais faraud
et mes gestes bien théâtraux
un mot qui manque un mot de trop
avec la peur et le sang maestro
tu ris je suis ton saltimbanque
un mot de trop un mot qui manque

dans la nuit froide mon brasero
ta chienne m'a planté les crocs
un mot qui manque un mot de trop
avec la peur jus de sureau
ton désamour m'a rendu branque
un mot de trop un mot qui manque

un point sur le plan du métro
je joue les durs un vrai maraud
un mot qui manque un mot de trop
avec la peur la sueur escroc
fermées les portes de la banque
un mot de trop un mot qui manque

je cherche refuge au bistrot
coup sur coup je deviens poivrot
un mot qui manque un mot de trop
avec la peur la soif accro
rien qu'un petit mec à la manque
un mot de trop un mot qui manque

vienne la guerre je s'rai héros
et serre un peu plus le garrot
un mot qui manque un mot de trop
du sang des larmes c'est ma nécro
une simple messe à Sénanque
un mot de trop un mot qui manque

15 novembre 2009

mercredi 11 novembre 2009

dans une heure

quelque chose a vrillé
au fond de son regard
les passants et les automobiles
sont un tableau abstrait
une nature morte qui fuit
elle ne sait plus très bien
si elle fait partie de l'œuvre
ou si elle est hors du monde

la tisane est brûlante et trop sucrée
l'horloge sur le comptoir la fusille du retard
un peu de rouge aux joues aux lèvres au cœur
dans une heure elle sera belle et heureuse

le ventre ravagé
par le maléfice des certitudes
et le bénéfice des doutes

quelque chose a craqué
dans le feu de ses yeux
les piétons et les cyclistes
sont un film d'animation
une science-fiction qui déjante
il ne sait plus très bien
s'il fait partie de la circulation
ou s'il est dedans l'écran de contrôle

la météo est mauvaise et trop forte
le compteur sur le tableau de bord le fusille du retard
un peu d'alcool aux joues aux lèvres au cœur
dans une heure il sera fier et heureux

le cerveau ravagé
par le maléfice des certitudes
et le bénéfice des doutes

quelque chose a flambé
au creux de ses veines
les sémaphores et les gyrophares
sont un video-game survolté
un feu d'artifice qui explose
elle ne sait plus très bien
si elle traverse le napalm
ou si elle est game over

le cendrier est fumant et trop plein
le miroir derrière le comptoir la fusille du retard
un peu de panique aux joues aux lèvres au cœur
dans une heure elle sera laide et soumise

et si elle l'abandonnait

le ventre ravagé
par le maléfice des certitudes
et le bénéfice des doutes

quelque chose s'est dissout
dans la machinerie du sang
les enseignes et les vitrines
sont un concert ultra rock
un sons et lumières qui s'ecstasy
il ne sait plus très bien
s'il est calé sur replay
ou s'il est Larsen à jamais

le haut-parleur est pourri et trop de basses
l'aiguille du volume le fusille du retard
un peu de haine aux joues aux lèvres au cœur
dans une heure il sera calmé et veuf

si jamais il la trouvait

le cerveau ravagé
par le maléfice des certitudes
et le bénéfice des doutes

like a rolling stone comme disait Robert Allen Zimmerman


11 novembre 2009

lundi 9 novembre 2009

d'orme de saule et de frêne

dans la valise d'un vent d'est
des sachets de sable roux
le musc des chameaux et la sueur des chameliers
l'odeur du sel
et une pluie d'étoiles fraîches
le noisetier a dansé une danse lascive
et s'est retrouvé nu dans un rayon de soleil

la hache a donné le signal
du bois d'orme de saule et de frêne
je m'écartèlerai dans les bûches

au creux de la silhouette de la colline plein sud
des tombereaux de feuilles
des grappes de sorbiers et de sureaux
crottins de sanglier
l'odeur de moisissure
et la ligne blanche du ciel
le peuplier est minaret
sur le sentier de la ville

l'allumette a donné le signal
du bois d'orme de saule et de frêne
je me dissoudrai dans les flammes

au fond du val vers l'ouest
les nuages de l'atlantique
une pluie froide des brumes aigres
les chevaux mouillés agglutinés sous le noyer
les bottes des paysans sous les tables du bistrot
l'odeur de la terre
et la buée sur la vitre
le sapin noir est menaçant
sur chemin de l'école

le nœud qui craque a donné le signal
du bois d'orme de saule et de frêne
je me fondrai dans les braises


au-delà de la falaise qui file vers le nord
des coulures de ciel noir
l'air est de glace le vent est de lame
les bouquetins dorment dans la neige
le naseau clos l'œil éteint
l'odeur de l'urine
et la lune qui balance
l'arole se crispe
dans le couloir d'avalanche

un long soupir a donné le signal
du bois d'orme de saule et de frêne
je me disséminerai sous les cendres

like a rolling stone comme disait Robert Allen Zimmerman

9 novembre 2009

samedi 7 novembre 2009

noeud de vache

Dans la petite ville heureuse, le temps va se mettre aux guirlandes, fils de pêche ou câbles métalliques, selon le poids ou l'humeur. La réclame n'a pas attendu le jour des morts pour vanter le luxe nécessaire. Se recommandent : chapons et dindes, nobliaux et notables. Dans les veillées d'automne, quand les terrasses se vident de fumeurs, et les cafés sont vides de vivants, quelques uns tissaient le piège, glu et nœud coulant.

Dans la ville heureuse, le bon président suivait tranquille le fil électrique de son vélo sans se soucier des sautes de vent mauvais sur la passerelle, juste un regard à droite au carrefour des corbeaux, et un coup de frein au giratoire des opportunistes. Quelques clous sur le parcours, des punaises sur la chaise, des pétards chinois dans les dossiers, et des nids de pourriture dans l'immeuble. Combien sur le marché des dupes une peau de président ? Oh presque rien, juste un costard de notable et une livrée trop grande pour des jeunets aux dents longues. Et un nœud papillon pour la rancune. La petite ficelle lâche un gros soupir et l'étiquette "farces et attrapes".

La santé est vendue sous mensonge. On renifle devant l'assurance. On tousse dans son portemonnaie et on voudrait bien cracher à la face des malandrins. Mais la pandémie nous l'interdit. L'état de droit est en quarantaine, on est prié de ne pas déranger.

Au chapitre des morts, il me reste encore quelques larmes et quelques rires pour saluer le départ de dame Carole Roussopoulos, si grande dame et si noble de pensée et d'éthique. Qui dira à ce cimetière sous le château sa chance et son honneur ?

A l'abri dans son fumoir, la petite ficelle prend bien note ce soir qu'un quarteron de démocrates est passé maître dans la pratique du nœud de vache.

7 novembre 2009

qui de nous deux


les fous rires les rires doux
sans rien dire c'est dire tout


je ne sais plus très bien
qui de nous deux parbleu
est l'arbitre du jeu

tu commences ma phrase
je finis ton dessert
j'atterris sur ta base
tu peuples mon désert
je suis ta métastase
tu deviens mon cancer
tu m'enfermes alcatraz
je te tiens dans mes serres


je ne sais plus très bien
qui de nous deux bon sang
détient notre serment

tu danses tu m'embrases
j'en oublie tes misères
je le dis sans emphase
ton chant est mon concert
et mon sang dans ton vase
et le tien fait geyser
nos désirs sont en phase
de plaisirs émissaires


je ne sais plus très bien
qui de nous deux crénom
délivre l'abandon

tu m'enveloppes de gaz
je rebois ton sancerre
je repars un peu naze
ton ivresse est sincère
je ne rate pas l'occase
grappiller ton rosaire
je vais toucher l'extase
ton désir me lacère


je ne sais plus très bien
qui de nous deux vingt dieux
est l'arbitre du jeu

les fous rires les rires doux
sans rien dire c'est dire tout

7 novembre 2009