1440 minutes

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editions d'autre part

dimanche 27 décembre 2015

je descends


l’horaire de la tisane ajournée d’un désert
la couverture de survie dans la trousse du funambule
le roman psychologique qui maquille les faux accidents
la prière du lundi pour colorier la semaine

je descends vers la gare avec un bouquet de violettes

le cérémonial de l’alambic pour le marc de champagne
les chaussettes en laine vierge pour le père de l’exploratrice
le poème en verges d’épines pour les amours sublimes
la prière du mercredi pour laver les affronts

je descends vers l’usine avec le costume des vacances

l’hymne au jus de vierge joué par un castrat
le boléro noir et sang pour la fille du toréador
le roman-photo dans la salle d’attente de l’oncologue
la prière du vendredi pour faire maigre et cru

je descends vers le fleuve avec un bidon de rhum

la découverte d’un millésime dans le caveau du patriarche
le châle d’astrakan pour la cantatrice chinoise
le récit du parapente découvrant l’Atlantide
la prière du dimanche pour bénir la chaudrée de légumes

je descends vers le cimetière avec un lumignon mauve

j’arrose les chrysanthèmes avec le sel de vos larmes

jeudi 24 décembre 2015

je lève la trace


la guitare flamenco pour incendier la passion
les sardines grillées pour enfumer la poésie
la ciguë et le froment dansant la manzanilla
la vieille Méditerranée remontant les égouts

je lève la trace des jours ardents sur un tapis de laine

le vibraphone qui joue sur la gamme de l’échine
l’oursin gobé tout cru quand la mer est partie
les araignées d’eau chorégraphiant l’orage
l’eau tiède des marais dans le bassin des lavandières

je lève la piste des renoncules dans l’évier des misères

le djembé choléra dans la réserve de manioc
les chenilles en saumure dans le salpêtre et le soufre
le moustique-tigre s’exerçant à la danse de Saint Guy
la pompe à eau qui se trompe, elle pompe du pétrole

je lève la mèche des feux d’artifices de l’abnégation

la caisse claire pour célébrer le lever du jour
la confiture d’épine-vinette et de gratte-cul
la guêpe des sables se vautrant dans la crème solaire
la piscine d’eau de mer aseptisée et blanchie à l’ammoniac

je lève la patte sur le poteau des douleurs enfouies

je lâche la dernière goutte dans la carafe d’eau-de-rose

mercredi 23 décembre 2015

je fais des ricochets


la guenille du malappris au porte-manteau du diable
la plumée de linotte sur la portée des synapses
le tabouret bancal devant le confessionnal
la pénitence en habit rouge dans les draps de sueur

je fais des ricochets sur la carte-mémoire

la redingote du bossu à la sépulture de l’évêque
les rémiges du gypaète à l’école d’aviation
le strapontin de velours pour le cul d’une blonde
le chagrin en liquette devant l’hôtel de passe

je fais des ricochets sur le carnet du lait

le costard du condamné au défilé de haute-couture
le gésier du faisan qui concasse la grenaille
le fauteuil d’orchestre avachi pour le vieux tromboniste
la rancœur en peignoir sur le lit adultère

je fais des ricochets sur le catalogue des vacances

le manteau de l’esclave pour cacher les blessures
le croupion du corbeau sur l’idée de délivrance
le prie-Dieu désossé à la décharge des âmes
les regrets éternels en chemise d’opéré

je fais des ricochets sur le registre des élus

je marche sur les eaux juste avant la débâcle

mardi 22 décembre 2015

je fabrique de l'hiver


le gigot qui renifle dans son bain de saumure
le vasistas qui repeint la nostalgie en bleu
le jet de la musique sur les rides de l’étang
la bouderie de l’araignée dans sa toile mitée
 
je fabrique de l’hiver avec un pot de miel
 
la poule qui ne pondra plus qu’un œuf sur deux
le saut-de-loup pour séquestrer tous les chaperons rouges
le souffle des ventilateurs pour soulever les jupes
la comptabilité du scolopendre pour clôturer l’année
 
je fabrique de l’hiver avec le chant du bouvreuil
 
la génisse flamande qui rêve de Camargue
l’œil-de-bœuf translucide pour blanchir les fantômes
le grincement des serrures pour la mélancolie
la danse des cafards les nuits de saute-croches
 
je fabrique de l’hiver avec du gruau d’épeautre
 
le bouc qui se lave avec du purin d’ortie
la lucarne discrète pour illuminer la portion d’avoine
les claquements du volet qui rythment la veillée
le bourdon impatient qui sort pisser sous la lune
 
je fabrique de l’hiver avec une écharpe de gui
je rajoute du gros sel dans mes conserves d’habitudes

mercredi 16 décembre 2015

je paie l'impôt


la poudre de riz pour rendre triste le portrait à la gouache
le coq du clocher renversé dans la boule à neige
le soleil mis en pièces sur l’enclume imbécile
la tonte du mouton en gage au mont-de-piété

je paie l’impôt sur les mensonges et la colère

la farine de manioc pour blanchir les mariages
la pintade confuse couvant sur le fumier
la lanterne des morts alimentée au gaz de ville
les trésors de la pie volés à la pêche miraculeuse

je paie l’impôt sur la vanité et la déprime

le talc mentholé sur les fesses du diable
le faisan attaché à la croix des missions
le cierge de Pâques qui se prend pour le buisson ardent
la rumination du bœuf à la Fête du Goût

je paie l’impôt sur la nourriture et la digestion

le pigment indigo sur les paupières de la gitane
la tourterelle ensanglantée qui roucoule son coran
l’allumette Bengale qui se prend pour un volcan
le gousset du hibou sur mon carnet d’épargne

je paie l’impôt sur les souvenirs et la pitié

je détaxe la passion et le calvaire

mardi 15 décembre 2015

je balaie l'idée de péché


le métronome de la rue au passage des morts
les mains des tout-petits pour choper la musique
la boisson des vendanges au sucre de raisin
la jupe courte de la maline devant les pommes d’amour

je balaie le trottoir devant le marchand de sable

le tambour du boulevard pour le cortège funèbre
la pom-pom-girl en noir jonglant du goupillon
l’esprit-de-vin en carafe dans nos têtes de mort
le caleçon de flanelle en berne sur l’étendage

je balaie le purgatoire de ses remises de peine

la trompette dans la cour à la levée du drapeau
la relève de la garde pour le pipi patriotique
la tisane de fenouil pour noyer les aveux
le bustier de satin pour sauver la poitrine

je balaie la chambre nuptiale des poussières d’étoiles

la cymbale du pavé qui dégèle l’ennui
la fugue de la veuve dans les bars à matelots
la bière à la cerise pour avaler les gros pépins
la gaine-culotte qui s’impatiente des vendanges

je balaie l’idée de péché devant la porte du plaisir

je ramasse les confettis tombés de Vénus 

jeudi 10 décembre 2015

je soulève le tapis

la diva accrochée au micro des blessures
la réplique oubliée sur le comptoir de zinc
le maquillage qui prend le large vaincu de couperose
la chaussure de velours souillée de vin qui tache
 
je soulève le tapis des secrets enrubannés
 
le danseur abimé par des amours inquiètes
la courbette ingénue aux fesses déprimées
le justaucorps déchiré dans le vestiaire borgne
le chausson trempé d’acide qui s’en va sur sa pointe
 
je soulève le tapis des fausses habitudes
 
le musicien pendu aux doubles-croches de la vie
le bécarre tombé de sa chaise dans le trou du silence
l’archet qui rate le train du printemps camarguais
le sabot aux échardes claudiquant la mesure
 
je soulève le tapis des blattes endormies
 
le poète essoré suçant ses rimes pauvres
l’alexandrin fuyant par la césure ouverte
le paletot des jours heureux oublié à la morgue
la spartiate délassée devant la fosse aux lions
 
je soulève le tapis des rêves interdits
j’ajoute un testament dans le casier du comptable

mercredi 9 décembre 2015

je marche sur le fil


le grelot du cheval à l’heure du laitier
le snipper endormi derrière son brasero
le rouge-gorge appliqué signalant la relève
la vareuse indigo déteignant sur la joue
 
je marche sur le pont de la déconvenue
 
la chanterelle de l’amoureuse à l’heure de la sieste
la sentinelle distraite dessinant des coquelicots
le coucou revêche refusant son bail à loyer
le blouson de cuir pour descendre au baston
 
je marche dans le couloir des embuscades
 
le carillon des fêtes à l’heure de l’apéro
le sergent de ville guilleret souriant au malappris
la pie honnête rapportant la Bague d’Or
le veston démocratique accroché au platane
 
je marche sur le trottoir des anicroches
 
le bourdon annonçant la fin du patriarche
le juge de paix excédé désarmant les héritiers
le busard fatigué dépeçant les couleuvres
le manteau de la discorde cachant le crucifix
 
je marche sur le fil
je rejoins la trapéziste dans son rêve

 

lundi 7 décembre 2015

je sors de la caverne


l’absinthe réconciliée dans le calice des synapses
la livrée du vicaire à la patère de la grange
le chrysanthème de décembre sur le pavé verglacé
la chevelure de Vénus en guirlandes de noces
 
je sors de la caverne avec un sac d’étoiles
 
la macération de chélidoine sur les verrues de l’âme
le pardessus de mélancolie sur l’épaule de la vierge
le bouton d’or à ses seins, la drosera à son ventre
le fichu de Véronique sur la béance du pied-bot
 
je sors de la caverne avec un sac d’étoiles
 
le jus de l’épine-vinette dans la sauce calvaire
le caleçon du pauvre à la fenêtre de la reine
la belladone agenouillée devant le crucifix
le tricot d’Ariane qui file toutes ses mailles
 
je sors de la caverne avec un sac d’étoiles
 
l’eau-de-coing dans le désordre des poitrines
la voilette de charme sur le visage de la madone
la pivoine meurtrie sous la lanière du fouet
les menstrues d’Eve pour ensemencer la terre
 
je sors de ma caverne
je cherche les braises de ton satellite

mercredi 2 décembre 2015

je veille sur ce trottoir imbécile


la loi sur l’arbitraire et le désordre coutumier
la traitrise de la dispense et la ventilation du doute
l’invention du tranquille devant l’escalier de secours
 
le choix de la tombola et le protocole du hasard
le spasme de l’habitude et le tiroir à confessions
les enchères de l’oubli devant les fleurs de la passion
 
la construction du pont et le creusement du gouffre
la corde à linge sur le canal et la distorsion de la girouette
la germination des remords devant l’autel de l’innocence
 
le vin des réjouissances et le lait caillé de la colère
l’arrogance du drapeau et la honte de la couche-culotte
le chariot d’injures devant le cortège des croisés
 
la démonstration de l’errance et le cheval qui boite
la cervelle figée du martinet et le magnétisme cramé de la boussole
le mécanisme de l’erreur devant l’équation des longitudes
 
l’arpège du malfaisant et la percussion des vengeances
le tunnelier du pardon et la paresse barricade
la recette du futur devant le chagrin des casseroles
 
je veille sur ce trottoir imbécile et frotte la lampe de la ville

dimanche 15 novembre 2015

pizzicato à crochet


pizzicato à crochet
sac à venin
poche à poison
 
pamoison devant l’absence
respiration du double-fond
ça craque dans la poumonnerie
ça siffle ça grogne
 
la corde à linge donne le la
l’orchestre boite sur les bécarres
la diane sonne sur la flaque
le poisson dort dans le hamac
 
pizzicato à crachin
sac à colère
poche à fiel
 
hébétude devant le départ
digestion dans le tiroir à secrets
ça grince dans les tuyauteries
ça pète ça chuinte
 
la nuisette part en syncope
les soupirs vibrent dans la fosse
les matines se chantent sur le givre
la couleuvre funambule sur l’étendage
 
pizzicato de l’adieu
sac à larmes
poche à vinasse
 
pizzicato debout
sac à pinces
poche à clous

jeudi 12 novembre 2015

on ne se remet pas du chant de l'alouette


le désordre du fiel au fond de la trachée
l’angélus qui fonctionne à la lampe carbure
la hache sur le billot quand le doute s’égare
l’horodateur du sexe qui renonce au boulier
 
on ne se remet pas du chant de l’alouette
 
la renonciation du coq les matins de piété
la cloche qui prend le large délaissant l’habitude
le cheval amoureux croquant la marguerite
la nurserie inquiète les soirs de coqueluche
 
on ne se remet pas du chant de l’alouette
 
la fenêtre qui s’ouvre sur les anniversaires
la tisane millésimée à l’heure du bourreau
l’allée du cimetière dans ton Monopoly
et ton lit à potence jeté sur le trottoir
 
on ne se remet pas du chant de l’alouette
 
le tambour acrobate qui se joue sur l’enclume
le soupir et son double préfaçant la musique
la bannière déchirée oubliée au bistrot
et l’agonie du fifre un lendemain de guerre
 
on ne se remet pas du chant de l’alouette
on se laisse mourir quand passent les outardes

mercredi 4 novembre 2015

pirouli oui


la soupe au radis noir les soirs de remontrance
le pain rassis le vin acide
on gratte une croûte au genou
on renifle un morve recuite
on racornit les mots du chardon
 
pirouli pirouli
 
la chaudrée de rutabaga les soirs de perdition
la pomme fripée la peau sur le lait
on gratte le furoncle sur la fesse
on bave un jus de pénitence
on raccourcit les mots de la passion
 
pirouli piroula pirouli
 
le bouillon de navet les nuits de réclusion
le fromage trop salé l’ail pourri
on gratte le remord sur le sein
on sue un jus de chaussette
on rapièce les mots de la rose trémière
 
pirouli piroula pirouli oui
 
la soupe aux abats les nuits d’agonie
l’âme déshydratée le pardon en miettes
on gratte le givre sur le cœur
on pisse une fièvre malpropre
on rappond les mots de la corde
 
pirouli piroula
pirouli oui pirouli


vendredi 23 octobre 2015

j'onomatope


le soleil craque le bec du pic
le soleil croque les piques des becs
 
j’onomatope la cruauté
crû oté
Théo cru
au crû thé
ho ! t’es cru
je phtongue
je diphtongue
je sonne
je consonne
j’onomatope
top top tetop top
 
le soleil triture le marais salant
le soleil torture le salé marrant
 
j’onomatope le fou rire
file roule
foule lire
fil lourd
lit four
je phtongue
je diphtongue
je sonne
je consonne
j’onomatope
top top tetop top
 
le soleil lacère la peau du dos
le soleil la serre à l’appeau dodu
 
j’onomatope le sentiment
sans temps mis
sans mi-temps
sang menti
tant ciment
je phtongue
je dis
je diphtongue
je sonne
je consonne
je voyou
tu voyelles
j’onomatope
top top tetop top
top top tetop top

dimanche 18 octobre 2015

que si ! que no !


no ! si ! que si ! no !

siderons la plaine sous la caillasse et la vase
considérons le talus de ronces et de rhododendrons
solidons le remord
consolidons toute jouissance
 
le vacarme du charivari des libations
la fontaine de liqueurs d’agrumes
le verglas des fous rires
le verjus des raisins amers
 
no ! si ! que si ! no !
 
sacrons les pelouses interdites
consacrons le banc des amoureux
tactons les mamelles indolentes
contactons les femelles affranchies
 
le tintamarre des rogatons
le tonneau des vins indociles
le bord du chagrin dessoûlé
le rebord du vide sidéral

le rebord du vide considérable

que si ! que no !
 
je poste un angélus en courrier prioritaire
je composte un aller-retour vers le purgatoire
livrons un charroi de regrets
délivrons les parfums de miséricorde

l’intendance des reproches et des conciliation
le saloir des blessures interlopes
le corridor vers l’ascèse
le bidon de bleu pour barbouiller les étoiles
 
que si ! que no ! no !
 
je tiens la vanité par le bout de la queue
je contiens des jus inavoués inavouables
tentons la face nord des délivrances
contentons-nous des forges et des poisons
 
le chuchotement des pardons
le garrot des contraintes
l’illumination des cierges délabrés
le jeu de passion sans esbroufe
l’enjeu de passion sans griffe
l’enjeu de compassion escogriffe
 
no ! si ! que si ! no !
 
signons signons l’acte de mitraille 
consignons de bon aloi
consignons la déclaration de guerre
 
si ! no ! que no ! si !

vendredi 9 octobre 2015

le cagnard cogne


Le cagnard cogne.

Comme une pluie de graviers sur le chien qu’on ne connait pas, sur le boumian qui sent l’ail, sur l’étrangère qui veut nous imposer sa marmaille.
 
Le cagnard cogne.

Et dzim ! et dzam ! Comme une ligne électrique à haute tension qui tombe sur le bétail, comme la lanière du fouet sur les peaux condamnées, comme la bêtise sur une tige de coquelicot.

Le cagnard cogne.

Je suis couché sous la chorégraphie des pistons dans la salle des machines. Je ressens des mouvements de pulsion dans mes tuyauteries. J’esclandre et je purge. J’entends les détonations dans les clapets. Ça fume, ça siffle. Le diable a fait fortune dans ces recoins. Je vocifère et je pêche. La mort remet sa petite culotte.

Juste après le moment précis de la bombe H, du grésillement du bombyx, de la frénésie du bambou. Juste après l’iconographie des assassinats de taureaux, juste après l’hydrométrie des larmes des chamelles, juste après l’épuisement des chattes cancéreuses.

Le cagnard cogne.

Pourquoi ces relâchements ? Pourquoi ces mugissements ?

Des enfants pissent contre les cyprès du cimetière. Des enfants crachent dans le sens du vent. Des enfants piétinent les tomates destinées à la cantine.

Que cogne le cagnard sur la cabosse des femmes rebondies !
Que cogne le cagnard sur le caillebotis des anges !

La femme pacotille a pendu son voisin aux baleines de son soutif. Elle collectionne les métacarpes de ses amants pour en faire des pendants d’oreilles, qu’elle vend sur le marché à touristes.

Des monceaux d’envies d’amour s’évaporent de la plage. On a besoin de vent et d’un peu de compassion. Un tourteau imbécile grince de la pince au passage d’une naïade. Je lui promets une recette de rouille et de piments. La naïade se déguste en agrumes. Et en papaye, le dimanche.

Que cogne le cagnard sur le croupion du coq en coqueluche !
Que cogne le cagnard sur la conque des femmes rétives !

L’orthophoniste exerce l’articulation des injures et des mots d’amour.
Le tambourinaire syncope une cadence trachéotomisée.

C’est l’incendie des baraquements. C’est la crucifixion de la cigale. C’est l’heure des braves et la minute vernaculaire.

La roubine refoule les rejets des chalutiers. Les mouettes transpirent un jus d’anchois et de seiche.

Je presse une contrition alanguie. J’essore le vent et les galets. Je file du glacier aux îles vierges. Des tortues antiques ricanent et m’envoient au Musée de l’Homme. Pour voir !

Regarde le rostre des libellules, regarde la grimace de l’araignée.
Déguste le suc gastrique de la couleuvre à collier.

Je gobe un œuf de flamant rose. Je croque des salicornes.

Oh ! les voltes fatiguées des chevaux dans le paddock, l’agacement de la palefrenière sur le fumier, la tourbe qui se raconte des histoires de chevalerie !

Le sable se souvient.

Le cagnard cogne.

Comme un plan de bataille avortée. Comme une chute de limaille sur les peaux renégates. Comme un cancer de l’os qui choisit la vertèbre.

Le cagnard cogne.
Et dzim ! et dzam !

C’est l’histoire d’un ventre qui dissout les cailloux, la pharmacie des pétoles de chamois et de l’arnica, la désertification des glandes à venin. Le salut de l’humain.

Que cogne le cagnard sur la crousille de l’estropié !
Que cogne le cagnard sur les coquilles d’œufs des lézards !

J’ai demandé au taureau, le taureau n’a pas voulu.
J’ai demandé au chevau, le chevau n’a pas voulu.
J’ai demandé au vélo, le vélo n’a pas voulu.
J’ai demandé au pied-bot, et je suis arrivé.
Bonjour, je suis en avance.

L’orthophoniste onomatopée sa fanfreluche. Elle échafaude son nombril de consonnes gutturales. Je lui dirai des râles d’amour et des ronflements.

Je pulse, j’expulse.
Je purge, j’expurge.
Je pire, j’empire.
Je t’empereurerai la houle sur la plage des couteaux et des vives.
Je t’Attila et Alexandre, mon amour.

Que cogne le cagnard sur la Carabosse et sa carabistouille !
Que cogne le cagnard sur les croquemitaines d’escarmouches !

Le plus beau poème est celui qui s’inscrit sur le sable les soirs de demi-lune, et que la marée efface et dissout dans le sel de la mer.

Implorons la mémoire des cœlacanthes !

Le plus beau des poèmes sèche et craquèle sous la canicule.
En attendant, la cervelle se met en danseuse sur son petit vélo.

Le cagnard cogne.

Le souffle, le sang.
Je ne bronche pas, je me bats.

lundi 5 octobre 2015

Holà! le vent sur les chevaux


Holà ! le vent sur les chevaux ! Holà ! le vent sur le convoi !
 
Hey hey hey hey hey ! ssh ssh ssh !
 
J’habite un plumard rempli de chaille bleue. Ma peau porte les stigmates de poèmes non datés, cruels et sobres comme le tranchant du sabre.

J’habite un container arrimé à la falaise là-haut, sur une falaise plein sud, là-haut plus hautque les trois mille, là-haut vers les parapentistes oubliés.

J’habite un scaphandre dans la marne, dans une retenue de lies, dans le cuvier de noyaux fermentés.
 
Mon territoire s’étend d’un roman de gare dévoreur de pucelles au poème kirghize qui apaise les chevaux, sans oublier les borborygmes énamourés des pensionnats.

Holà ! le vent sur les corbeaux ! Holà ! le vent sous les soutanes !

Hey hey hey hey hey ! ssh ssh ssh !

Les tourments seront enfin calmés quand mes os seront brisés par un vol de lucanes veufs. Je pourrai alors suer un jus de libellules vierges. Je pourrai renifler une morve de blaireau.

Pardon, Monsieur le Commissaire, j’ai écrasé dieu en reculant devant l’humilité. Je ne le referai plus. J’irai de l’avant, promis, juré, craché. J’irai vous en acheter un autre au comptoir des amibes, à la boutique deuxième main des machineries grotesques, au marché des esclaves trop voûtés.

Heya ! Heya ! Heya ! Hop !

Heya ! Ssh !

Dans le couloir de la flibuste, les araignées vont gaillard devant, les recoins en plein centre, les guet-apens au vu de tous les renégats.

Dans le corridor des rapines, les belettes sifflent la carmagnole. Rongés les fils électriques, brisées les ampoules à coups de queues.

Dans le placard des coupe-gorges, la mouche à merde compte les fioles de sang séché, se nettoie les pattes avec le mucus du diable, organise ses pontes dans le désordre des chairs.

Mes excuses, Madame la Juge, j’ai étranglé la bonne conscience en m’exerçant au nœud de cravate. Je ne manque pas d’air quand il s’agit d’aiguiser la schlague, de nouer le garrot. Bah ! vous en trouverez d’autres par paquets de douze au supermarché des madones, dans les dortoirs des saints, chez la confrérie des anges au cul pelé.

Ssh ! ssh ! ssh ! ssh ! hey ! hey !

Je suis né jour de boucherie. Mon premier cri était un couinement de cochon affolé. Par la Saint Sacrifice, j’ai été accouché dans le jardin potager, parmi les rutabagas, les scorsonères, les rattes et les choux, of course.

J’ai été mis à rassir avec les jarrets, les boudins, les atriaux, les têtes de veaux, les museaux de bœuf. Les oreilles et la queue, of course aussi.

Heya ! heya ! ssh !

Ma couveuse était une barquette d’endives, une corbeille de noix, un panier de poires à cuire. Mon école s’est faite à la choucroute, à la compote de raves, au petit salé, of course encore.

Quatre hivers dans le saloir,
Trois automnes dans le fumoir,
Deux étés sur l’alpage,
Un printemps sur le ventre des femmes.

Ssh ! ssh ! ssh !

Holà ! le vent sur les tréteaux ! Holà ! le vent dans les grandes orgues !

Je quitte le trottoir des renonciations avec la gourde pleine d’un distillat d’injures et d’une remontée de rumination.

Je quitte la rue des estropiés sur un brancard à roulettes tiré par une chèvre haut-valaisanne.

Je quitte la ville des potences et des lapidations avec la bénédiction sacrilège d’une clandestine trop belle pour mes mains.

Pardon, ma Seigneurie, j’ai noyé votre miséricorde en lavant ma chemise. Le savon noir, l’eau trouble du ruisseau. Je vous en ramènerai du talus des bannis, de la clairière des infirmes, de la prairie des enfants mort-nés.

Ho ! ho ! ho ! ssh !

Je pue. Je conspue.
Je presse. Je compresse.

Ce soir est une tombola.
Ce soir est un jeu de l’oie.
Ce soir est un jeu de massacre.

Holà ! le vent sur les roseaux ! Holà ! le vent sur les lumignons !

Cette nuit est un tombeau.
Cette nuit n’est pas un jeu.
Cette nuit est un chamboultou.

Je pue. Je presse.
Je fonds.
Je confonds.

Hey hey hey hey hey ! ssh ssh ssh !