1440 minutes

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editions d'autre part

mardi 30 juin 2009

en fauchant

elle pataugeait dans le carmin
couleur de ses amours proscrites
vils fantassins
vieux crève-la-faim
elle s’amouracha d’un ermite
elle s’amouracha d’un ermite

elle but le plaisir rédempteur
en s’essuyant d’une imposture

elle rampait dans le lavandin
blouse légère de carmélite
pauvre arlequin
beau malandrin
ah les beaux mâles qu’on décapite
ah les beaux mâles qu’on décapite

elle enjôla le fossoyeur
en le lavant de ses souillures

elle cisaillait le romarin
le long des allées interdites
fier pèlerin
faux clandestin
elle se savait la favorite
elle se savait la favorite

elle séduisit un monseigneur
ignorant toute forfaiture

elle s’allongeait dans le jasmin
pour une pamoison subite
juste un câlin
mais tant humain
sa destinée sera maudite
sa destinée sera maudite

en enlaçant un noir faucheur
elle ne sentit pas sa morsure

en enlaçant ce noir faucheur
elle ne sentit pas la mort
en enlaçant la faux
elle ne sentit pas
en fauchant
elle

30 juin 2009

dimanche 28 juin 2009

fermer les paupières


chemise froissée
cœur en charpie
les yeux brûlés
par l’incendie
tu sens ta main
frôler son sein
tu sens ta main
frôler son sein

combien de temps
pour jouir de la vie
combien de vies
pour mesurer le temps
tu peux souffler la lumière

robe troussée
au pied du lit
les peaux cramées
c’est l’incendie
elle sent ton droit
fouiller sa loi
elle sent ton droit
fouiller sa loi

combien de temps
pour jouir de la vie
combien de vies
pour mesurer le temps
tu peux baiser ta geôlière

les draps souillés
quelles blessures
cœur fatigué
trop d’aventures
tandis qu’elle dort
sans bruit tu sors
tandis qu’elle dort
sans bruit tu sors

combien de temps
pour jouir de la vie
combien de vies
pour mesurer le temps
tu peux quitter ta civière

valise prête
dans l’escalier
gloire ou défaite
cœur estropié
le coq hésite
chante ta fuite
le coq hésite
chante ta fuite

combien de temps
pour jouir de la vie
combien de vies
pour mesurer le temps
tu peux pousser la barrière

une autre ville
un cabanon
maigre mobile
mauvais filon
efface tes traces
éteins ta race
efface tes traces
éteins ta race

combien de temps
pour jouir de la vie
combien de vies
pour mesurer le temps
tu peux brûler la tanière

chaussures usées
larmes aux genoux
corps épuisé
remords au cou
vol de corbeau
derrière ton dos
vol de corbeau
derrière ton dos

combien de temps
pour jouir de la vie
combien de vies
pour mesurer le temps
tu peux passer la frontière

c’est pas un lit
c’est un tombeau
une vieille vie
à l’échafaud
nouvelle couture
à ton armure
nouvelle couture
à ton armure

combien de temps
pour jouir de la vie
combien de vies
pour mesurer le temps
tu peux fermer les paupières

combien de temps
pour jouir de la vie
combien de vies
pour mesurer le temps
tu peux fermer les paupières

28 juin 2009

mardi 23 juin 2009

sans blooooog

les mots dansent sur l’écran
une étincelle une lueur un feu follet
on trouve le bon mot
le trempe dans un mauvais vinaigre
et l’enjolive d’un cardère
surgit une allusion
macérée dans le fiel

le voici le pamphlet sinon l’anathème

un clic et le voici parti
jusqu’aux étoiles jusqu’à obamaland jusqu’aux soirées de téhéran
et jusqu’aux lèvres de la censure

un nobliau de province s’offusque
reprend deux fois des gouttes
et agite la clochette vengeresse
rataplan
un clown nez creux et cils barbelés
sort un gros portemonnaie vide en cuir d’opprobre
il réclame de l’argent à la maigre assemblée
en disant
sans blooooog

les touches frétillent sur le clavier
un grain de sable un gravier un pavé
on trouve la phrase implacable
la noue dans un bouquet de gaillardes
et la parfume de lisier
surgit une pique joliette
et c’est une hallebarde

le voici le billet sinon l’exécution

un clic et le voici parti
jusqu’au soleil jusqu’à l’académie jusqu’aux pas perdus
et jusqu’au billot de justice

une vieille star de la pensée enrage
respire des sels
et sonne son bodyguard
rapataplan
un clown dent creuse et crâne mirador
porte un coffre-fort vide en acier d’innocence
il réclame mille écus au gardien de chambre
en chantant
sans blooooog

les pensées fourmillent sur la toile
une comique une chronique une résistance
on fomente un dialogue
on roule dans la farine
et on grille aux épices
surgit une parole citoyenne
et c’est un parjure

la voici la critique sinon la diffamation

un clic et la voici partie
jusqu’à la lune jusqu’à l’inquisition jusqu’aux heures sombres
et jusqu’au compte bancaire

les nobliaux et les penseurs
agitent la plainte et la réparation en monnaie
quand le clown à grands gestes cloue une bouche
c’est mille gueules qui s’ouvrent
et qui crient
mon blooooog

le canard graisse ses plumes sans se soucier de son cholestérol

23 juin 2009

dimanche 21 juin 2009

solstice

il est tard à l’horloge
ce jour ne veut pas finir
la montagne vibre ses pastels
et le ciel restera bleu

dans son lit
la jeune fille repousse le drap
et dénude sa poitrine
dans sa chambre
le jeune homme
tressaille et transpire

solstice dans les champs
et feu de la saint-jean
c’est la fin du printemps

il est trop tôt au réveil
cette nuit ne veut pas venir
la montagne est un lavis mauve
et le ciel éclate de prusse

dans sa robette à fleur
la jeune fille frétille
et oublie un bouton
dans son costume de laine
le jeune homme
frémit et se sent à l’étroit

elle monte à l’église
comme une communiante
par le chemin des chèvrefeuilles
il descend à la messe
comme un officiant
par le sentier des sureaux

solstice dans les champs
et feu de la saint-jean
c’est la fin du printemps

il est l’heure fidèle au clocher
le prêtre parle d’amour et de renonciation
les paroissiens pensent à l’amour et au vin de noix

voici le temps de l’élévation

dans son émoi
la jeune fille fait des œillades
à saint-antoine de padoue
dans sa tête
le jeune homme embrasse à pleine bouche
sainte-thérèse de lisieux

solstice sur l’étang
et bal de la saint-jean
c’est la fin du printemps

c’est plus tard dans la nuit
qu’une veuve sans sommeil
a vu l’enfant de chœur
baiser les pieds de marie-madeleine

solstice dans les prés
la si bonne rosée
c’est le jus de l’été

like a rolling stone comme disait Robert Allen Zimmerman

21 juin 2009

mardi 16 juin 2009

de son sac de toile

il descend du train
quand la chevêche regagne son clocher
au café de la gare à cette heure
on sert du café et de la bière
il demande un bouillon et le nom d’une rue

quelles amours qui portent un nom de sainte

de son sac de toile
il sort du tabac à rouler
et un médaillon d’argent sale

il traverse la place
quand le hobereau saigne une pigeonne
à l’armurerie à cette heure
on vend des couteaux de chasse et des pièges à loup
il demande de la poudre noire et le nom d’un juge

quelles amours qui portent un nom de vierge

de son sac de toile
il sort un harmonica
et une mèche à détonateur

il longe le fleuve
quand le martin-pêcheur assomme un alevin
au tire-pipe à cette heure
il y a des peluches et le décolleté de la patronne
il demande des fleurs en plastique et un prénom de femme

quelles amours qui portent un nom de ville

de son sac de toile
il sort une carte d’Asie
et des lunettes de glaciers

il frappe à une porte
quand le rossignol chante dans le peuplier
à l’étage à cette heure
on offre de la tisane et des serviettes chaudes
il lui demande un lit et lui dit son prénom

quelles amours qui portent un nom de rivière

de son sac de toile
il sort une bague
et un extrait de naissance

il ôte ses bottes
quand le hibou chante au clocher
dans la chambre à cette heure
on dénoue les nattes et les dentelles
il ne demande rien et reçoit la lumière

quelles amours qui portent un nom d’étoile

dans son sac de toile
il range l’atlas de son cœur
et un si beau chant d’amour

quelles amours qui portent un nom de passage

le navet qui pourrit effluve le chef d’œuvre


16 juin 2009

dimanche 14 juin 2009

dans la balance

qu’est-ce que l’on met dans la balance
ne pas mourir par manque d’air
comme l’amour manque de chair
nous sommes sourds à la sentence
qu’est-ce que l’on met dans la balance
nous sommes sourds à la sentence

qu’est-ce que l’on met dans la balance
vrai mensonge en soie naturelle
pur sentiment mais si pluriel
pour un grand geste d’élégance
qu’est-ce que l’on met dans la balance
pour un grand geste d’élégance

qu’est-ce que l’on met dans la balance
on espérait une caresse
c’est avec l’ongle que l'on blesse
ô pardonnez nos négligences
qu’est-ce que l’on met dans la balance
ô pardonnez nos négligences

qu’est-ce que l’on met dans la balance
bal costumé dans la chapelle
un lien d’ortie dans les dentelles
pour connaître l’extravagance
qu’est-ce que l’on met dans la balance
pour connaître l’extravagance

qu’est-ce que l’on met dans la balance
la mauvaise foi se profile
sur le roc fidèle de l’île
pour aiguiser nos discordances
qu’est-ce que l’on met dans la balance
pour aiguiser nos discordances

qu’est-ce que l’on met dans la balance
on additionne des bouteilles
des rires et des pendants d’oreilles
pour ces cruelles confidences
qu’est-ce que l’on met dans la balance
pour ces cruelles confidences

qu’est-ce que l’on met dans la balance
ne pas mourir un jour de pluie
accordez-moi je vous supplie
un triste accord à la romance
qu’est-ce que l’on met dans la balance
un triste accord à la romance


qu’est-ce que l’on met dans la balance
ne pas mourir par manque d’air
comme l’amour manque de chair
nous sommes sourds à la sentence
qu’est-ce que l’on met dans la balance
un triste accord à la romance


14 juin 2009

dimanche 7 juin 2009

le mot le plus juste

le mot le plus juste est celui qu’on ne dit pas
le mot qui s’arrête aux lèvres est le mot juste

j’ai planté une borne au bout de mon taisage
j’ai cloué un sentiment au bout d’une beuglante

l’homme de ce pays remonte les pierres sur les montagnes
l’homme de ce pays remonte le sable dans le mur des barrages
l’homme de ce pays remonte la neige à coups de canons
l’homme de ce pays remonte le vin dans les glaciers

le mot le plus juste est celui qu’on ne dit pas
le mot qui s’arrête aux lèvres est le mot juste

j’ai noué une phrase à la grille du confessionnal
j’ai muré un chant dans l’escalier de la caserne

le pays de cet homme s’écroule en pierriers
le pays de cet homme déboule en cascades
le pays de cet homme s’effondre en avalanches
le pays de cet homme se rabote en ravines

j’ai tué un proverbe avec le fiel de ma langue
j’ai planté une fourche sur une idée de poème

le mot le plus juste est celui qui se grimace
le mot qui se pend à la glotte est le mot juste


le canard graisse ses plumes sans se soucier de son cholestérol

en guise de remerciement pour
le chant du bouquetin
de et avec Pierre-Isaïe Duc
Petithéâtre, Sion, 4 juin 2009


6 juin 2009

lundi 1 juin 2009

à notre dame

il y avait la promenade de l’étang
et le promontoire aux libellules
les arabesques des joncs et le cri d’une foulque
il y avait le sentier sous les vernes
et le lit de bruyère
le bruissement des trembles et le vol d’une abeille
il y avait

sur l’autel des promesses
une jeune fille dépose un muguet

il y eut les violons et les yeux noirs
la rencontre virile et les pleurs retenus
il y eut les gémissements et l’abandon
la marque du plaisir et le chant du coucou
il y eut

à notre dame des aveux
la pucelle du matin éclate de joie

il y avait le chemin des vignes
et le muret aux lézards
la musique du vent et le cri d’une huppe
il y avait la cabane de bois gris
et le matelas de crin
la mécanique des cigales et le vol d’une guêpe
il y avait

sur l’autel de l’espoir
une jeune femme dépose une gaillarde

il y eut des clairons et les dents blanches
les torses en sueur et les rires cornalin
il y eut des tornades puis l’air absent
la brûlure du plaisir et le chant de l’alouette
il y eut

à notre dame des remords
une voluptueuse allume un cierge

il y avait la route des luzernes
et le fossé aux criquets
la poussière des pollens et le cri d’une crécerelle
il y avait le carré d’ombre sous le tilleul
et le tapis de cresson
la mélodie du ruisseau et le vol du frelon
il y avait

sur l’autel du bonheur
une jeune mère dépose un myosotis

il y eut les timbales et les lèvres rouges
les mains ligaturées et le silence d’acier
il y eu un orage et la mitraille
la salve de l’horreur et le chant d’un busard
il y eut

à notre dame des douleurs
un veuve baise un chardon

like a rolling stone comme disait Robert Allen Zimmerman



1 juin 2009

ça sent la lavande

la dernière étoile du matin file vers le sud
une brume froide glisse sur l’argent du lac
la brise fait valser la roselière
l’églantine est un violon d’insectes

ça sent la lavande dans ton chignon

le seul nuage de midi file vers l’est
un morillon déchire le miroir du lac
aucun mouvement dans la prairie de seigle
le coquelicot s’étiole de chaleur

ça sent la mauve dans ton corsage

le corbeau du soir file vers le nord
un montagne ocre se reflète dans le lac
un coup de vent couche les avoines
le sureau blanc est une invite à l’amour

ça sent le houblon sous tes jupes

sans gêne ni rapière


1 juin 2009