1440 minutes

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editions d'autre part

lundi 27 avril 2009

pinponicaille et sacripant

le vent de l’est a mis dans ses valises
des pollens pionniers
des clarinettes folles
des parfums de musc
et des regards d’acier

au bas de la rue tartare
le mauvais garçon tresse une liane de cuir
au guidon de son vélomoteur

pinponicaille et sacripant

le vent du nord a mis dans son cabas
un vol de sternes
des chants dissonants
une odeur de hareng
et des rires banquises

au bas de la rue batave
une délurée gotique allume une clope à bout doré
et bave un gros mot à son portable

pinponicaille et sacripant

le vent de l’ouest a mis dans son sac de sport
des comics au ketchup
des prières soul ou gospel
des relents d’huile rance
et des certitudes in their god

au bas de la rue des palmiers
un indien blond marchande une turquoise de pacotille
à la gitane du tire-pipe

pinponicaille et sacripant

le vent du sud a mis dans son filet
des lentilles ou du sable
des mélopées et une nuit
des suées d’encens et de genièvre
et des serments d’étoiles

au bas de la rue des dunes
l’éphèbe un peu femelle vend son corps
et de la coke de bazar

pinponicaille et sacripant

la météo de nuit annonce une bourrasque nord ouest
dans son garage la costumière
prépare des panoplies guantánamo
des costards de traders
et des blouses d’infirmières

sacripant sacripant sacripant
et pinponicaille

un baromètre éberlué prédit une tornade sud est
dans un container des cousettes enchaînées
façonnent des gilets terroristes
des burkas de conférences
et des masques antigrippes

sacripant sacripant sacripant
et pinponicaille

like a rolling stone comme disait Robert Allen Zimmerman

27 avril 2009

dimanche 26 avril 2009

les chiens n'font pas des chats

on arrive on regarde
on cherche un sentiment
on échange un’ parole
une promesse un mensonge
on adresse un rencart
au buffet de la gare
y a des pâtes italiennes
et des chambr’ à l’étage

les chiens n’font pas des chats
et les chats font c’qu’ils veulent

on rougit on sourit
on peint sa vie en rose
on gomme ses défauts
on oublie les enfants
ça s’ra bien cette vie
tout un après-midi
six heures de vacances
dans une ville de province

les chiens n’font pas des chats
et les chats font c’qu’ils veulent

au moment de franchir
la porte de la chambre
on surprend un remords
pendu à la serrure
on l’écarte d’un geste
qui finit en caresse
elle fermera les yeux
quand tu te déshabilles

les chiens n’font pas des chats
et les chats font c’qu’ils veulent

le miracle des peaux
un peu de maladresse
redéfait l’écheveau
des chemins du désir
avec une inconnue
tu refais l’équation
de la dimension ixe
mêlés à tes y grecs

les chiens n’font pas des chats
et les chats font c’qu’ils veulent

on se rhabille en hâte
on fait gaffe aux cheveux
sur la jaquette en laine
tu paies discrètement
pendant qu’elle téléphone
à un autre quelconque
tu sors ton agenda
vous choisissez une date

les chiens n’font pas des chats
et les chats font c’qu’ils veulent

tu dis au r’voir madame
au bas de l’escalier
tu la trouves banale
et tu te sens vieilli
tu as franchi le pas
des amours clandestines
tu ressembles à papa
et elle ressemble à qui

les chiens n’font pas des chats
et les chats font c’qu’ils veulent

ton chien ne f’ra pas d’chat
et toi ce que tu peux
et toi ce que tu peux

26 avril 2009

maraudeur

le ciel est blanc comme un buvard
au bout d’la rue le réverbère
s’éteint et rentr’à son dortoir
le ciel est lourd comme une prière

un merle callasse trois notes
le poirier neige sous le vent
ton sourire me don quichotte
ton sein est mon moulin-à-vent

la cloche de six heures
m’annonce maraudeur

au bleu le ciel a pris rencart
au bout d’la rue le réverbère
s’ébroue le long du promenoir
au bleu le ciel fait des manières

un coucou rubinstein’ deux notes
le poirier salue vif-argent
ton pas de deux fraîche gavotte
me voici chevalier fervent

la cloche de douze heures
me fera maraudeur

le ciel est peint de rouge fard
au bout d’la rue le réverbère
fait le guet devant l’abreuvoir
le ciel est une grenade fière

écoute le chant de la linotte
le bon poirier fait paravent
à ces je t’aime qu’on chuchote
nous nous aim’rons à bout touchant

la cloche de vingt heures
m’a fait ton maraudeur
la cloche de minuit
me mettra dans ton lit

la cloche de vingt heures
m’a fait ton maraudeur
la cloche de minuit
me mettra dans ton lit


25 avril 2009

dimanche 19 avril 2009

jusqu'à quand

à quelle date le grand débarras
les héritages les promesses les perpétuations
la vigne de muscat et le pêcher au beau milieu
la grange dans le vallon et le sureau protecteur
à quand le vide-grenier
l’album où il manque une photo
les secrets de famille dans la boîte en fer blanc
la recette de la saucisse et celle de l’eau de coing

une litanie des saints pour les éphémérides
quelques béatitudes pour les journées à intention
la journée du sida après le jour des morts

je t’aime ô je t’aime
depuis le fond du moyen âge
je t’aime jusqu’à demain
et demain c’est lundi

à quelle saison le grand changement
les résolutions les promesses et les motivations
la chambre d’amis et le jardin des fleurs
la carte d’itinéraires et le lac de montagne
à quand la mue attendue
les nouvelles recettes et les nouveaux points de vue
une liste de prénoms et de villes inconnues
une porte coupe-feu pour barrer le passé

un recueil de dictons à rire et à pleurer
quelques biographies pour espérance
la journée de la sardine et la fête des mères

je t’aime ô je t’aime
depuis les borborygmes
je t’aime jusqu’à ma prochaine chanson
et je chanterai l’an pile l’exacte couleur

à quel mois le grand départ
les programmes les promesses les recommandations
les chaussures de marche et la photo passeport
le routard cinq étoiles et le dictionnaire espéranto volapük
à quand le dîner d’adieu
l’apéro verre à pied à l’étrier
l’embarras des pères et les larmes des mères
une tache de vin rouge sur un billet d’avion

une liste de numéros téléphone banque assurance
quelques adresses étapes
la journée de l’eau et le jour du poisson

je t’aime ô je t’aime
depuis les grandes migrations
je t’aime jusqu’aux vacances
et les vacances c’est la vie dans ta maison

à quelle heure la grande nouvelle
les déclarations les promesses les abandons
un serment jeté en l’air et un vol de papillon
un feu de fous rires un brasero de romarin
à quand la surprise sans surprise
l’oreiller de lavande et la dentelle de lin
ton regard méditerranée et ma peau provence
une corbeille d’épices et de fruits

un calendrier de rencontres et de désirs
quelques dates précieuses et secrètes
le jour des pivoines et la journée des malades

je t’aime ô je t’aime
je t’aime comme un malade
depuis le diagnostic
je t’aime jusqu’à la rechute
et la rechute c’est à chaque fois

je ne crois pas à la rémission
j’ai perdu cette foi
et je sais la date
et je sais quand

sans gêne ni rapière


19 avril 2009

mercredi 15 avril 2009

le coq a chanté

la jeune fille balbutiait un allemand guttural
elle découvrait un autre land
une rivière de plaine, une bourgade, un préau
la liberté, la rencontre, les premiers pas
son sang a séché brun sur le carrelage de la salle de bain

que dire à la femme qui viendra nettoyer le carnage

il s’est glissé dans un trou de la balustrade
de la caillasse et de la ferraille
le hangar à plein vent
trois pieds de choux deux chicorées
un plant de valériane
au pied d’un tonneau
il a planté une pivoine blanche
à ses racines
trois serments deux promesses un secret
il a osé un sourire

quelqu’un a dit le coq a chanté une première fois

le jeune homme chantait en latin un hymne à la création
il traçait dans la neige un hommage à dieu
adieu prudence, adieu la vie
l’avalanche n’a que faire des âmes célestes
un corps est pris entre glace et neige dans le lac de montagne

que dire à l’employé d’usine qui purgera la conduite

elle a franchi le portail électrique
des containers et des ballots
le dépôt des ventes et celui des stocks oubliés
un luminaire dans un bureau
des hommes et des armes un matelas des billets
le plaisir est facile il suffit de payer
quand elle est repartie au matin
la radio a annoncé le coq a chanté pour la deuxième fois


la vieille dame psalmodiait une berceuse slave
elle flottait sur un nouveau printemps
cracher sur sa mère et langer son époux
le porto est refoulé par un ictus sévère
s’il n’était destiné à l’incinération son tibia ferait une bonne flûte

que dire à l’harmoniste qu’il lui manque un accord

ils ont rampé par le soupirail
d’abord la cave la glace vanille et le bordeaux
la cuisine les chips et la vodka
le salon la vidéo porno et le whisky
enfin la chambre les dentelles et le satin
vingt-trois ans à eux deux et autant d’innocences
une troisième fois le coq a chanté
plus fort que la sentence du juge

j’ai longtemps hésité
et j’ai reposé ma deuxième pierre


le jeune reporter enquêtait sur les lucioles et les feux follets
la trace longeait les aspergières et les rideaux de peupliers
cette nuit dira qui attire qui
pourquoi la lumière jaune est si vive et si forte
le gyrophare de l’ambulance est un bleu requiem

que dire à l’enfant de chœur qu’il n’est pas de résurrection

le coq a livré son dernier combat
il ne dira plus les trahisons et les remords

que dire aux amis
ma première pierre qu’en ai-je fait

le navet qui pourrit effluve le chef d’œuvre


15 avril 2009

dimanche 5 avril 2009

l'appeau de ta peau

pizzicato de violoncelle et d’échine
rythme de tambourin et de diaphragme
vibrato d’archet et d’aine

ô l’appeau de ta peau

fraicheur et lourdeur d’une pivoine
ivresse et vertige d’une prairie de pissenlits
pétulance et acidité d’une capucine

ô l’appeau de ta peau

c’est la franchise d’un regard de cheval
c’est la magie d’une souplesse de chat
c’est l’élégance d’un vol de canard

ô l’appeau de ta peau

poisson grillé sel de camargue et graines de fenouil
asperge violette vinaigrette de safran
mesclun de varech cresson de fontaine

ô l’appeau de ta peau

une robe de lin
une dentelle de jersey
des brillants sur une voilette

ô l’appeau de ta peau

c’est la tension d’une arbalète
c’est la violence d’une fronde
c’est l’artifice d’une grenade

ô l’appeau de ta peau

musique de chimie atome croche
cantique de physique soupir courant alternatif
cantique de physique désir courant continu

ô l’appeau de ta peau

sans gêne ni rapière


5 avril 2009

vendredi 3 avril 2009

qui a payé son dû

il errait dans les galeries marchandes de l’aéroport
collectionnait les revues économiques et les tickets de transport
ne parlait pas, faisait des gestes tranquilles et sobres
les gardiens l’appelaient Coco parce qu’il dormait sous le portique d’une parfumerie
tous les matins à huit heures pile il arrivait trop tard
pour se réclamer aux objets trouvés

qui a payé son dû à la consigne

on la voyait sur les grandes avenues
robe de cuir lacérée, talon cassé et porte-cigarette tordu
borborygmes et œillades grotesques
les chasseurs lui filaient une clope contre un pince-fesse
tous les jours à midi elle s’écroulait
devant le porche de la chapelle

qui a payé son dû à la quête pour les missions

il marchait d’un grand pas sur le périphérique
cernait la ville avant de la conquérir
comptait les motocycles et les camions citernes
le cantonnier le chassait au-delà du péage
tous les jours à quinze heures il gesticulait sur la voie rapide
en attendant l’ambulance

qui a payé son dû au SAMU

elle traversait le marché à contresens
mélangeait dans son cornet fromage et fleurs, miel et poireaux
son survêtement puait l’urine et le tabac froid
le gardien de la paix l’aimait bien et lui offrait un galopin
tous les soirs à six heures elle repartait
sur le marchepied du camion poubelles

qui a payé son dû à la taxe déchet

mis en couple ce jour ils claudiquent dans le parc
elle vomit en pleurant il pisse en riant
le monde est à leurs pieds, engrais et pissenlits
la vie est brillante comme un bidon de minium
le percepteur efface leurs noms sur le livre des vivants
toutes les nuits à point d’heure ils baisent obscènes
sur un lit de pensées et d’œillets

qui a payé leur dû au planning familial
qui a payé leur dû
au bureau de la protection de l’enfance
au service des biscornus et des mauvaises vies
à l’office des bons offices et des rédemptions

le navet qui pourrit effluve le chef d’œuvre

3 avril 2009