lorsque
je descends
la marée de l’angélus, quand les embruns
prennent le goût des sexes libérés, quand la prière des lactations fait jaillir
la laitance des oursins, quand les algues font Nijinski dans les vagues, quand
la vase joue à la vase pour détruire les châteaux
le ressac des pauvres, celui de la quête
silencieuse, du croûton de pain frotté de sueur, de la friture à l’huile
avariée, celui qui lave les pieds usés de trop de marches, celui qui dilue les
menstrues libératrices, celui qui dissout les préservatifs usagés
les siphons entre les rochers noirs, repaire de
poulpes, laverie des poissons translucides, dortoir de forbans et corsaires,
lupanar des sirènes, confessionnal des tridents de Neptune, boite à lettres
pour le courrier des femmes de marins, abreuvoir des veuves
lorsque
je descends
je participe à l’évacuation des orques
j’assiste à l’accostement des dépucelages
j’assiste le chalutier dans sa tempête
je marie le poisson blanc au quartier de lune
lorsque
je descends
la bosse des baleines à bosse, toboggan des
absoutes, dérive vers les disparitions mesurées, trottoir des dislocations douloureuses,
trouée vers le grand trou, réception des chutes libres des anges
la route interdite par le sextant, la mauvaise
nuit de la vigie, la boussole soûle qui pleure, l’étoile qui danse fuyant la
lune, la longitude dénudée par un trop-plein d’amour, le crochet du capitaine
et la dent en or de la flibuste
dans la soute de la salle des machines, où ça
claque, ça tire, ça grince, ça étincelle, où la pression des huiles
surchauffées siffle la Symphonie du Nouveau Monde, où les machinistes s’accrochent
aux poulies pour ne pas sombrer, où les manivelles et les leviers dansent avec
la mort, où le repos est banni définitivement
lorsque
je descends
je participe à la manœuvres des remorqueurs
j’assiste à l’échouage des tankers
j’assiste la moussaillonne dans son bain
je marie le chapelet de moules à la robe
cardinale
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