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dimanche 15 mai 2016

lorsque je descends 5

lorsque je descends

la marée de l’angélus, quand les embruns prennent le goût des sexes libérés, quand la prière des lactations fait jaillir la laitance des oursins, quand les algues font Nijinski dans les vagues, quand la vase joue à la vase pour détruire les châteaux

le ressac des pauvres, celui de la quête silencieuse, du croûton de pain frotté de sueur, de la friture à l’huile avariée, celui qui lave les pieds usés de trop de marches, celui qui dilue les menstrues libératrices, celui qui dissout les préservatifs usagés

les siphons entre les rochers noirs, repaire de poulpes, laverie des poissons translucides, dortoir de forbans et corsaires, lupanar des sirènes, confessionnal des tridents de Neptune, boite à lettres pour le courrier des femmes de marins, abreuvoir des veuves

lorsque je descends

je participe à l’évacuation des orques
j’assiste à l’accostement des dépucelages
j’assiste le chalutier dans sa tempête
je marie le poisson blanc au quartier de lune

lorsque je descends

la bosse des baleines à bosse, toboggan des absoutes, dérive vers les disparitions mesurées, trottoir des dislocations douloureuses, trouée vers le grand trou, réception des chutes libres des anges

la route interdite par le sextant, la mauvaise nuit de la vigie, la boussole soûle qui pleure, l’étoile qui danse fuyant la lune, la longitude dénudée par un trop-plein d’amour, le crochet du capitaine et la dent en or de la flibuste

dans la soute de la salle des machines, où ça claque, ça tire, ça grince, ça étincelle, où la pression des huiles surchauffées siffle la Symphonie du Nouveau Monde, où les machinistes s’accrochent aux poulies pour ne pas sombrer, où les manivelles et les leviers dansent avec la mort, où le repos est banni définitivement

lorsque je descends

je participe à la manœuvres des remorqueurs
j’assiste à l’échouage des tankers
j’assiste la moussaillonne dans son bain
je marie le chapelet de moules à la robe cardinale


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