1440 minutes

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editions d'autre part

dimanche 27 décembre 2015

je descends


l’horaire de la tisane ajournée d’un désert
la couverture de survie dans la trousse du funambule
le roman psychologique qui maquille les faux accidents
la prière du lundi pour colorier la semaine

je descends vers la gare avec un bouquet de violettes

le cérémonial de l’alambic pour le marc de champagne
les chaussettes en laine vierge pour le père de l’exploratrice
le poème en verges d’épines pour les amours sublimes
la prière du mercredi pour laver les affronts

je descends vers l’usine avec le costume des vacances

l’hymne au jus de vierge joué par un castrat
le boléro noir et sang pour la fille du toréador
le roman-photo dans la salle d’attente de l’oncologue
la prière du vendredi pour faire maigre et cru

je descends vers le fleuve avec un bidon de rhum

la découverte d’un millésime dans le caveau du patriarche
le châle d’astrakan pour la cantatrice chinoise
le récit du parapente découvrant l’Atlantide
la prière du dimanche pour bénir la chaudrée de légumes

je descends vers le cimetière avec un lumignon mauve

j’arrose les chrysanthèmes avec le sel de vos larmes

jeudi 24 décembre 2015

je lève la trace


la guitare flamenco pour incendier la passion
les sardines grillées pour enfumer la poésie
la ciguë et le froment dansant la manzanilla
la vieille Méditerranée remontant les égouts

je lève la trace des jours ardents sur un tapis de laine

le vibraphone qui joue sur la gamme de l’échine
l’oursin gobé tout cru quand la mer est partie
les araignées d’eau chorégraphiant l’orage
l’eau tiède des marais dans le bassin des lavandières

je lève la piste des renoncules dans l’évier des misères

le djembé choléra dans la réserve de manioc
les chenilles en saumure dans le salpêtre et le soufre
le moustique-tigre s’exerçant à la danse de Saint Guy
la pompe à eau qui se trompe, elle pompe du pétrole

je lève la mèche des feux d’artifices de l’abnégation

la caisse claire pour célébrer le lever du jour
la confiture d’épine-vinette et de gratte-cul
la guêpe des sables se vautrant dans la crème solaire
la piscine d’eau de mer aseptisée et blanchie à l’ammoniac

je lève la patte sur le poteau des douleurs enfouies

je lâche la dernière goutte dans la carafe d’eau-de-rose

mercredi 23 décembre 2015

je fais des ricochets


la guenille du malappris au porte-manteau du diable
la plumée de linotte sur la portée des synapses
le tabouret bancal devant le confessionnal
la pénitence en habit rouge dans les draps de sueur

je fais des ricochets sur la carte-mémoire

la redingote du bossu à la sépulture de l’évêque
les rémiges du gypaète à l’école d’aviation
le strapontin de velours pour le cul d’une blonde
le chagrin en liquette devant l’hôtel de passe

je fais des ricochets sur le carnet du lait

le costard du condamné au défilé de haute-couture
le gésier du faisan qui concasse la grenaille
le fauteuil d’orchestre avachi pour le vieux tromboniste
la rancœur en peignoir sur le lit adultère

je fais des ricochets sur le catalogue des vacances

le manteau de l’esclave pour cacher les blessures
le croupion du corbeau sur l’idée de délivrance
le prie-Dieu désossé à la décharge des âmes
les regrets éternels en chemise d’opéré

je fais des ricochets sur le registre des élus

je marche sur les eaux juste avant la débâcle

mardi 22 décembre 2015

je fabrique de l'hiver


le gigot qui renifle dans son bain de saumure
le vasistas qui repeint la nostalgie en bleu
le jet de la musique sur les rides de l’étang
la bouderie de l’araignée dans sa toile mitée
 
je fabrique de l’hiver avec un pot de miel
 
la poule qui ne pondra plus qu’un œuf sur deux
le saut-de-loup pour séquestrer tous les chaperons rouges
le souffle des ventilateurs pour soulever les jupes
la comptabilité du scolopendre pour clôturer l’année
 
je fabrique de l’hiver avec le chant du bouvreuil
 
la génisse flamande qui rêve de Camargue
l’œil-de-bœuf translucide pour blanchir les fantômes
le grincement des serrures pour la mélancolie
la danse des cafards les nuits de saute-croches
 
je fabrique de l’hiver avec du gruau d’épeautre
 
le bouc qui se lave avec du purin d’ortie
la lucarne discrète pour illuminer la portion d’avoine
les claquements du volet qui rythment la veillée
le bourdon impatient qui sort pisser sous la lune
 
je fabrique de l’hiver avec une écharpe de gui
je rajoute du gros sel dans mes conserves d’habitudes

mercredi 16 décembre 2015

je paie l'impôt


la poudre de riz pour rendre triste le portrait à la gouache
le coq du clocher renversé dans la boule à neige
le soleil mis en pièces sur l’enclume imbécile
la tonte du mouton en gage au mont-de-piété

je paie l’impôt sur les mensonges et la colère

la farine de manioc pour blanchir les mariages
la pintade confuse couvant sur le fumier
la lanterne des morts alimentée au gaz de ville
les trésors de la pie volés à la pêche miraculeuse

je paie l’impôt sur la vanité et la déprime

le talc mentholé sur les fesses du diable
le faisan attaché à la croix des missions
le cierge de Pâques qui se prend pour le buisson ardent
la rumination du bœuf à la Fête du Goût

je paie l’impôt sur la nourriture et la digestion

le pigment indigo sur les paupières de la gitane
la tourterelle ensanglantée qui roucoule son coran
l’allumette Bengale qui se prend pour un volcan
le gousset du hibou sur mon carnet d’épargne

je paie l’impôt sur les souvenirs et la pitié

je détaxe la passion et le calvaire

mardi 15 décembre 2015

je balaie l'idée de péché


le métronome de la rue au passage des morts
les mains des tout-petits pour choper la musique
la boisson des vendanges au sucre de raisin
la jupe courte de la maline devant les pommes d’amour

je balaie le trottoir devant le marchand de sable

le tambour du boulevard pour le cortège funèbre
la pom-pom-girl en noir jonglant du goupillon
l’esprit-de-vin en carafe dans nos têtes de mort
le caleçon de flanelle en berne sur l’étendage

je balaie le purgatoire de ses remises de peine

la trompette dans la cour à la levée du drapeau
la relève de la garde pour le pipi patriotique
la tisane de fenouil pour noyer les aveux
le bustier de satin pour sauver la poitrine

je balaie la chambre nuptiale des poussières d’étoiles

la cymbale du pavé qui dégèle l’ennui
la fugue de la veuve dans les bars à matelots
la bière à la cerise pour avaler les gros pépins
la gaine-culotte qui s’impatiente des vendanges

je balaie l’idée de péché devant la porte du plaisir

je ramasse les confettis tombés de Vénus 

jeudi 10 décembre 2015

je soulève le tapis

la diva accrochée au micro des blessures
la réplique oubliée sur le comptoir de zinc
le maquillage qui prend le large vaincu de couperose
la chaussure de velours souillée de vin qui tache
 
je soulève le tapis des secrets enrubannés
 
le danseur abimé par des amours inquiètes
la courbette ingénue aux fesses déprimées
le justaucorps déchiré dans le vestiaire borgne
le chausson trempé d’acide qui s’en va sur sa pointe
 
je soulève le tapis des fausses habitudes
 
le musicien pendu aux doubles-croches de la vie
le bécarre tombé de sa chaise dans le trou du silence
l’archet qui rate le train du printemps camarguais
le sabot aux échardes claudiquant la mesure
 
je soulève le tapis des blattes endormies
 
le poète essoré suçant ses rimes pauvres
l’alexandrin fuyant par la césure ouverte
le paletot des jours heureux oublié à la morgue
la spartiate délassée devant la fosse aux lions
 
je soulève le tapis des rêves interdits
j’ajoute un testament dans le casier du comptable

mercredi 9 décembre 2015

je marche sur le fil


le grelot du cheval à l’heure du laitier
le snipper endormi derrière son brasero
le rouge-gorge appliqué signalant la relève
la vareuse indigo déteignant sur la joue
 
je marche sur le pont de la déconvenue
 
la chanterelle de l’amoureuse à l’heure de la sieste
la sentinelle distraite dessinant des coquelicots
le coucou revêche refusant son bail à loyer
le blouson de cuir pour descendre au baston
 
je marche dans le couloir des embuscades
 
le carillon des fêtes à l’heure de l’apéro
le sergent de ville guilleret souriant au malappris
la pie honnête rapportant la Bague d’Or
le veston démocratique accroché au platane
 
je marche sur le trottoir des anicroches
 
le bourdon annonçant la fin du patriarche
le juge de paix excédé désarmant les héritiers
le busard fatigué dépeçant les couleuvres
le manteau de la discorde cachant le crucifix
 
je marche sur le fil
je rejoins la trapéziste dans son rêve

 

lundi 7 décembre 2015

je sors de la caverne


l’absinthe réconciliée dans le calice des synapses
la livrée du vicaire à la patère de la grange
le chrysanthème de décembre sur le pavé verglacé
la chevelure de Vénus en guirlandes de noces
 
je sors de la caverne avec un sac d’étoiles
 
la macération de chélidoine sur les verrues de l’âme
le pardessus de mélancolie sur l’épaule de la vierge
le bouton d’or à ses seins, la drosera à son ventre
le fichu de Véronique sur la béance du pied-bot
 
je sors de la caverne avec un sac d’étoiles
 
le jus de l’épine-vinette dans la sauce calvaire
le caleçon du pauvre à la fenêtre de la reine
la belladone agenouillée devant le crucifix
le tricot d’Ariane qui file toutes ses mailles
 
je sors de la caverne avec un sac d’étoiles
 
l’eau-de-coing dans le désordre des poitrines
la voilette de charme sur le visage de la madone
la pivoine meurtrie sous la lanière du fouet
les menstrues d’Eve pour ensemencer la terre
 
je sors de ma caverne
je cherche les braises de ton satellite

mercredi 2 décembre 2015

je veille sur ce trottoir imbécile


la loi sur l’arbitraire et le désordre coutumier
la traitrise de la dispense et la ventilation du doute
l’invention du tranquille devant l’escalier de secours
 
le choix de la tombola et le protocole du hasard
le spasme de l’habitude et le tiroir à confessions
les enchères de l’oubli devant les fleurs de la passion
 
la construction du pont et le creusement du gouffre
la corde à linge sur le canal et la distorsion de la girouette
la germination des remords devant l’autel de l’innocence
 
le vin des réjouissances et le lait caillé de la colère
l’arrogance du drapeau et la honte de la couche-culotte
le chariot d’injures devant le cortège des croisés
 
la démonstration de l’errance et le cheval qui boite
la cervelle figée du martinet et le magnétisme cramé de la boussole
le mécanisme de l’erreur devant l’équation des longitudes
 
l’arpège du malfaisant et la percussion des vengeances
le tunnelier du pardon et la paresse barricade
la recette du futur devant le chagrin des casseroles
 
je veille sur ce trottoir imbécile et frotte la lampe de la ville