1440 minutes

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editions d'autre part

dimanche 31 mars 2013

miserere des trublions


aujourd’hui la vache filme le magistrat
le fendant et le pain de seigle
la vareuse pour la pluie
et les tricounis pour les beuses
si la stratégie est bonne
il prendra le commandement de l’alpage
du remonte-pente et de l’école catholique
il flattera sa cour de pain bénit et de marsanne
 
miserere des trublions et de l’ortie
 
 
aujourd’hui le busard fait le portrait de l’archevêque
le saint-chrême et la choucroute
l’oriflamme pour les péchés
et le dais pourpre pour l’ostensoir
si la quête est bonne
il ira à Rome ou à Compostelle
à Kippel ou à Manille
il imposera les mains sur la croupe de dame patronnesse
 
miserere des gnafrons et de la ronce
 
 
aujourd’hui la vipère interviewe le patron de l’école
l’ovomaltine et le porridge
le cahier à spirales pour le dogme
et la baguette de noisetier pour l’obéissance
si la soumission est bonne
il deviendra philosophe
chez les protestants et les sarrasins
il donnera de bonnes notes en latin de l’Opus Dei
 
miserere des ronchons et des rostres à venin
 
 
aujourd’hui le mulet salue la colonelle
du bromure inutile et de l’eau de lavures
du crottin pour les poireaux
et de l’avoine pour la mitraille
si la guerre est bonne
elle sera générale de bonne facture
et Prix Nobel de la Paix comme de juste
elle bouffera des colombes farcies d’olives
 
miserere des dondons et de la ciguë

samedi 30 mars 2013

je cultive la grenouille


ma bonne foi s’arrête au passage à niveau non gardé
 
ils peuvent bien passer
les trains de bonne fortune et de grande aventure
les wagons de flamants qui descendent vers la mer
les wagons qui remontent chargés d’exilés
et ceux des déportés
 
ils peuvent bien passer
les trains des déchets nucléaires
les wagons blindés d’armes et de cocaïne
les wagons des promenades d’écoles
et ceux des pendulaires
 
je cultive la grenouille pour avoir du beau temps
 
 
ma bonne volonté se composte à l’automate de l’identité
 
elles peuvent bien chanter
les révolutions du coin de ma rue
l’énergumène qui veut ma joie et mon salut
la clique de l’amicale des énervés
et celle des fêtes inédites
 
elles peuvent bien chanter
les manifestations des fraternités cataloguées
la leader des catéchèses
la chorale des veuves de guerres
et celle des recalés d’office
 
je cultive le lézard pour franchir la muraille
 
 
ma bonne étoile s’est foulé la cheville à la porte de l’aéroport
 
elles peuvent bien frémir
les envies de voyages vers les îles du nord
les évasions précoces vers les cols alpins
les feuilles de route vers l’abandon
et celle de la haute vieille cité
 
elles peuvent bien frémir
les hôtesses quadrilingues en costume folklorique
la poinçonneuse blafarde sans ambition
la marchande de sandwiches et de sodas
et celle des assurances loto

je cultive l’alouette pour remballer l’été

l'éteigneuse de réverbères


l’éteigneuse de réverbères souffle une haleine de jasmin
elle ramène à la crèche les cauchemars fatigués
elle se fait aguicheuse pour un beau marchand de sable
et fait le décompte des jours à risque
 
c’est une nuit de comètes délurées
une nuisette déposée sur l’abat-jour
c’est une nuit de clairière sous la lune
une culotte accrochée à la branche de l’étoile
 
on mange des frangipanes et des pralines
on boit du thé vert fumé au gingembre
un adagio à quatre mains
on tire le rideau sur des gémissements
 
l’éteigneuse de réverbères étrenne à tâtons la demoiselle d’honneur

vendredi 29 mars 2013

l'ouvreuse du cimetière


l’ouvreuse du cimetière accepte les pourboires
elle est complice des travers du fossoyeur
elle donne du pain sec au cheval de corbillard
et ramasse le crottin pour ses roses trémières
 
la mort s’invite en robe rouge
agonie au printemps, l’an est abimé
l’enfant de cœur secoue ses grelots
funérailles d’été, la moisson est brûlée
 
on mange son pain noir mouillé de larmes
on boit le vin de son baptême
requiem pour tuba, sonate pour hélicon
la famille orpheline bat la mesure de sa peine
 
l’ouvreuse du cimetière fait chavirer les ifs
 

l'huissière des portes de secours


l’huissière des portes de secours fait signer le livre d’or
elle annote les départs et les interdits de retour
elle repousse les bardanes et l’idée de chardons
et délivre des recettes de confitures et de caresses
 
la ville refait le bitume des chemins d’accueil
elle fleurit le palais de justice et pavoise l’hôtel de ville
le magasin des lingeries et celui des bondieuseries ouvrent le dimanche
le café de la gare offre un bouillon de légumes
 
on mange de la viande séchée de vaches noires
on boit du vin des glaciers d’avant la débâcle
un guignol joue de la guimbarde et de la trompe à nez
les grands-mères battent des mains pour diluer la mémoire
 
l’huissière des portes de secours ouvre le bal nègre avec le pompier de service
 

jeudi 28 mars 2013

la tentatrice des assistés


la tentatrice des assistés délocalise la manne publique
elle vend aux enchères des organes de deuxième main
elle soustrait aux orphelins des caresses et des peluches
et cultive dans sa baignoire des poissons volants
 
arithmétique défaussée par des chagrins de vésicules
l’accordéon pulmonaire recrache sa milonga
division commune des myosotis en pots
le balai tangue le déhanchement du cymbalum
 
on mange des ailes de manchot en papillote
on boit de la sueur de cheval sous le fouet
on plante un rosier rouge devant l’hôtel de la présidente
on soudoie l’aubergiste à dévergonder les marins
 
la tentatrice des assistés lève bien haut la jambe
 

mardi 26 mars 2013

la formalisatrice des repas de familles


la formalisatrice des repas de familles diffuse les injonctions
elle déjoue les excuses fausses et les menteries opaques
elle convoque l’amour et les collections de gommettes
et couchera ce soir sur le lit de camp du chef de division
 
sais-tu le calendrier des fausses couches
sais-tu les cours de flûte dans la remise
sais-tu le vacarme des choucas
et le prochain matin glorieux des anémones
 
on mange un navarin de cabri trop gras
on boit du diolinoir de Tourbillon
on lance le basson sur un rythme magyar
on renverra à son troupeau de chèvres l’oncle indélicat
 
la formalisatrice des repas de familles renverse le tango d’un adolescent
 

dimanche 24 mars 2013

la chroniqueuse des angélus


la chroniqueuse des angélus descend dans l’arène des vaches
elle reconnait les mobiles des prières et les intentions des bergers
elle améliore la composition du suif avec des indulgences
et falsifie les rendez-vous du vétérinaire
 
cartographie des prés de fauche
terrasses pour les luzernes
alcool de gentiane pour les vêlages
facéties du guide-cornes
 
on mange de la daube de taureau
on boit du goron de Bovernier
il y a trop de croches sur la partition du bugle
la marche militaire fout de l’arthrose aux hanches
 
la chroniqueuse des angélus fera valser les anges
 

la traqueuse de pommes d'amour


la traqueuse de pommes d’amour court les fêtes publiques
elle lèche les lèvres des enfants trop polis
elle soulève les jupes et fouille les poches des paletots
et s’enfuit en riant dans le train-fantôme
 
les yeux de la foraine du tire pipe
la moustache du lutteur des Carpates
la poitrine de la marchande de beignets
la veste de l’aventurier sur le fleuve Amazone
 
on mange des saucisse-pain-moutarde
on boit de la bière blonde trop maquillée
on met du savon noir sur le plancher du kiosque à musique
un homme-orchestre joue du jazz de la Nouvelle-Orléans
 
la traqueuse de pommes d’amour fait tourner son mickey
 

samedi 23 mars 2013

la manipulatrice des ombres


la manipulatrice des ombres guette le premier réverbère
elle séduit l’éclairagiste du grand théâtre
elle calcule les angles morts et les espaces vides
et compulse le registre des limbes et des trous
 
on dérange le soleil quand il fait l’amour
on déclame un poème avec un porte-voix
la sirène de l’usine signale les naissances et les morts
un policier distrait a perdu la trace du voleur de gris
 
on mange un brouet de lentilles jaunes
on boit du vin à la résine venu de l’île blanche
on arrange les tentures et les guirlandes de jonquilles
des jeunes filles en aubes rouges jouent de la clarinette
 
la manipulatrice des ombres invite à la nouba
 

vendredi 22 mars 2013

la kidnappeuse des pâquerettes


la kidnappeuse des pâquerettes invoque le gel du petit matin
elle peint en bleu de Prusse les chats gris et boiteux
elle déroute le livreur de journaux
et tricote une écharpe pour le cerisier du Japon
 
taches de café sur la carte des jardins
coulées de rouille sur la bêche
pilules de jeunesse dans la vitrine du droguiste
dent de lait, dent de lion, montée vers Pâques
 
on mange des œufs au lardon sur la terrasse
on boit du sirop d’agrumes avec de la glace pilée
on se souvient des giboulées et des pneumonies
le basson joue de guingois une marche nuptiale
 
la kidnappeuse de pâquerettes fait des courbettes aux militaires
 

jeudi 21 mars 2013

la tritureuse des papiers-buvards


la tritureuse des papiers-buvards redoute la mousson de mars
elle tempère les torrents et commande le fleuve
elle surveille la composition de l’encre et le grammage des cahiers
elle saupoudre de ciment les larmes des chagrins
 
la mâchoire xylophage du scieur de long
l’énervement de l’écrivain à la porte de l’école
les règles de la grammaire tricotées de sueur
la sentence farouche d’une rupture innommée
 
on mange de la soupe aux lettres dans des bols en pyrex
on boit de la tisane tiède sucrée à la mélasse
on tresse des lianes pour les mises à l’index
on sonne le clairon pour la défaite du sens
 
la tritureuse des papiers-buvards esquisse un fandango
 

mercredi 20 mars 2013

la dilapidatrice des aubes


la dilapidatrice des aubes renâcle comme une bête de somme
elle brise les ciels furtifs et les collines embrasées
elle balaie des porcelaines d’étoiles et de lunes
et ensache des soldes de brumes et de poudres d’os
 
la sonate crisse au sortir de sa chrysalide
le tambourin galope dans la poitrine de l’amoureuse
les soupirs prennent leurs aises et les cris aussi
ô le doux tableau des soupirs enlacés
 
on mange des raisins de Syracuse
on boit des vins rares de treilles alpines
un pinson turlute aux fenêtres du sanatorium
et les cymbales mouchent le nez du tambourin
 
la dilapidatrice des aubes donne le tournis au mutilé dans son fauteuil
 

jeudi 14 mars 2013

la prospectrice des chemins de rencontres


la prospectrice des chemins de rencontres dresse une carte à main levée
elle signale les carrefours mauvais et louches
elle sécurise les ravins et les feux de forêts
elle se lave à l’eau de pluie parfumée d’angélique
 
haie d’honneur des criquets sur l’esplanade
les amoureuses choisissent leur mari sur catalogue
cortège de pigeons sur la place de l’Etat Civil
les amoureux paradent au chant du coq
 
on mange du foie de poulain à la crème aigre
on boit du vin du Chili au terroir d’étoile
on brûle de l’encens dans des bols en étain
l’hélicon bat l’amble sur les remparts
 
la prospectrice des chemins de rencontres entreprend un lourdaud

dimanche 10 mars 2013

la surveillante des têtards


la surveillante des têtards marche dans l’ombre des aulnes
elle suce du jonc des tonneliers pour dissoudre la bile
elle maudit la foulque macroule et le butor étoilé
elle attrape un crapaud en rut et le met dans sa culotte
 
les roseaux captent à nouveau Radio-Libellule
le radeau du saunier accueille le Balajo
la ville touille ses hormones dans une volée de cloches
la cheffe de la voirie désinfecte ses amants
 
on mange des oranges blondes et des graines de coriandre
on boit de l’eau de la fontaine au sirop de badiane
on fait causette au garde des eaux et des guérites
la contrebasse tend son arc et vise la moelle épinière
 
la surveillante des têtards ouvre le bal des étourneaux
 

samedi 9 mars 2013

l'ergoteuse des dogmes blafards


l’ergoteuse des dogmes blafards balaie les remparts de la ville
elle déclame les noms des capitaines et des chanceliers
elle soudoie l’imprimeur et rationne l’encre rouge
elle écrase du talon-aiguille la morve de l’évêque
 
on torture des idiots sur les tréteaux du théâtre
identité noyée dans un sac au lavoir public
on flagelle une chanteuse nubile en souvenir des castrats
laitance de culpabilité dans le calice des soumis
 
on mange de la charogne, du poivre et de l’ail
on boit une macération de contrition dans des verres à liqueur
on bannit la parole et l’idée du grand soir
les cantiques font chahut devant la magistrature

l’ergoteuse des dogmes blafards tape du pied la mesure des tambours militaires
 

jeudi 7 mars 2013

la canotière du canal


la canotière du canal transborde les décrets de la ville
elle pêche les ablettes et flatte le castor
elle brûle les roseaux et dénonce le héron
elle envie les péniches pénétrant les écluses
 
le salut de l’égoutier et l’odeur de la vase
les cageots de fruits et les sacs de pains
la pomme d’amour chapardée à l’écolière
la chaussure d’Arthur dans le seau des voyelles
 
on mange de la friture et des tomates au sel
on boit du vin des sables vieilli dans des amphores
on accroche des missels aux fenêtres du port
on sort les mandolines sur le ponton d’Amérique
 
la canotière du canal pied-bote une marche irlandaise
 

dimanche 3 mars 2013

la ravitailleuse des émigrés


la ravitailleuse des émigrés pousse sa brouette dans la ruelle
elle collecte des pains et des légumes
elle raconte des histoires drôles et dit merci
elle soignera ses courbatures avec des cataplasmes d’argile
 
la carte du monde derrière la grille de barbelés
la rivière où les fauves viennent boire pour le reportage
un campement de nomades sur l’aire d’autoroute
des caisses de médicaments périmés et de bandages sales
 
on mange des pois chiches et des dattes séchées
on boit de l’eau du puits dans des tasses en fer blanc
on promet du savon et des bijoux en toc
un vieil homme fait une guitare avec une boite à biscuit et de la corde à linge
 
la ravitailleuse des émigrés danse pour la paix des âmes et des transports

samedi 2 mars 2013

l'escamoteuse de chapeaux


l’escamoteuse de chapeaux officie dans les cortèges et les réceptions
elle décoiffe les brigadiers et les fourriers
elle décapite l’évêque et les fanfarons
ses jours de repos, elle élève des lapins et des colombes
 
pirouette de robe rouge, pirouette de robe blanche
des écolières grimpent au ciel dans une marelle printanière
barcarole sanguine, barcarole violine
des écoliers foutent le feu au cabanon du régent
 
on mange des biscuits militaires périmés
on boit une piquette faite pour soûler
le président propose un moratoire sur les libations
l’hélicon s’amuse d’un rythme à trois pattes

l’escamoteuse de chapeaux lève bien haut sa gambette
 

l'équarrisseuse troglodyte


l’équarrisseuse troglodyte fait des feux d’ossements
elle parfume sa peau d’ambre et de benjoin
elle écrase sur ses seins des baies de belladone
elle renvoie ses amants au nourrissage des mules
 
graffitis obscènes  sur la paroi de la caverne
un crapaud baise une crapaude dans la fange qui dégèle
sang et sperme séché dans la couche tiède
un araignée au cul rouge strangule son mâle copulant
 
on mange de la viande crue et des fruits trop mûrs
on boit du jus d’argousier qui fait bander le rossignol
on éloigne les lynx et les blaireaux
un adolescent malhabile tape et bave sur un tambourin

l’équarrisseuse troglodyte rêve de danser avec un ours

vendredi 1 mars 2013

la piqueteuse de chemins de neige


la piqueteuse de chemins de neige demande conseil au tétras-lyre
il faut éviter les dérupes et les aires de parade
elle décompte les aroles et les mélèzes foudroyés
elle délace la mélancolie des enfants du voyer

c’est un vent de carême, congère, congère
c’est une cabane de vieille chasse, pan et panpan
c’est une trouée vers le ciel vide, lune noire, lune noire
c’est une terrasse d’ardoise bleue, pas de danse, pas de deux
 
on mange des pignons et des baies de genièvre
on boit de la rosée de lune
on lève la trace du boiteux et sa femme confuse
le cor de chasse fait une symphonie à l’avalanche
la piqueteuse de chemins de neige défie au paso-doble un vieux bouquetin