1440 minutes

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editions d'autre part

dimanche 24 avril 2016

lorsque je descends 4

lorsque je descends

le saut-de-loup, où se fomentent les vengeances mièvres, où se calcule l’impôt sur le sang et la buanderie, où se reposent les recels des punitions indigestes, où germent les indocilités et les manœuvres obsessionnelles

la grotte de la vouivre, soufflerie des rancœurs recuites, ventilateur des pets de volcan, chaudron des soupes maléfices, escalier de la peur, charivari des démones et diablats, ossuaire des martyres anonymes

le gouffre des sacrifices citadins, égout du dimanche soir, eaux usées des grosses semaines, dépotoir des chagrins, dortoir des douleurs parturientes, compost des fœtus et des placentas oubliés, fosse commune des décrets inutiles

lorsque je descends

          je participe à la révolution des vieilles horloges
          j’assiste au décrochement des minutes repères
          j’assiste le rhabilleur de la méthode
          je marie le désagrément au prurit

lorsque je descends

le chenal des abominations, où crèvent les animaux féconds et dociles, où pourrissent les promesses vendues à vil prix, où tourbillonnent les béatitudes et les louanges, où s’ensablent les amours turlupines, où se noie le doute scaphandrier

le goulet des désirs conscrits, méat où perle le plaisir, bourgeon gluant de sirop de rose, tige qui se croit tout permis, distillerie des spasmes de langueur, pamoison, frétillement, bourdon de fièvre, carillon d’orgasme

la dérupe des amitiés grotesques, trahison des « qu’est-ce que je t’ai dit », appui cassé des bâtons immortels, à la vie à la mort, au sang, à l’urine, lit de camp à sangles douteuses, tabouret de tortures, je renie ton âme, je tire le filin de la trappe, linceul dans la voile, garrot, poulie et palan

lorsque je descends

          je participe au réconfort des bannis
          j’assiste à la fermeture des portes
          j’assiste l’avocat des contritions
          je marie le fantasme à la geôlière

mardi 19 avril 2016

lorsque je descends 3

lorsque je descends

la corde raide du mépris, où les porcs épics s’érigent en remparts, où les sarbacanes projettent des crachats, où le plomb fondu coule dans les gosiers, où les fleurs de la passion lèvent le camp, où les menteries s’installent

la mue des vipères noires, glissade sur un tapis d’aiguilles, viandes à poison, cloaque de sang séché, écailles de la colère rentrée, attachement aux épines, desquamation des coudes et des genoux

les pattes de l’araignée le faucheux, filin tordu, acéré aux encoignures, file de marionnette funambule, fil de pêche interdite et corde de pendu analgésique, ressort sans muscle, morale sans envie, neurasthénie et pet-de-loup

le fil à ravauder les déchirures de l’âme, mélancolie béante sur un soleil absent, où sont brodées les fleurs anthracites des amours déchues, où les voltiges des chauves-souris dessinent des apocalypses, où est attachée la cathéter de l’urée et du scorbut

lorsque je descends

          je participe au renoncement du monde
          j’assiste au suicide de la renoncule
          j’assiste l’avalanche à naufrages
          je marie l’inculte au préconstruit

lorsque je descends

le labyrinthe du savoir, entre les équations du désir et la multiplication des bornes à compostage, parmi les assertions hideuses et les jurons multicolores, sous les trahisons, les promesses, le long des truismes moralo-perfect

le dictionnaire des hasards et des étoiles filantes, où s’accrochent les fées buboniques et contagieuses, où flotte le chandail médusé des mauvais jours, où balance l’alphabet vengeur des langues gutturales, où vagit l’enfant de la sécheresse

les méandres de la fiduciaire des âmes cicatrisées et des contritions interlopes, tapis-vert des marchandages assoiffés, paillasson pour les crottes du droit des pauvres, trémie pour la menue monnaie, caillebotis à dollars, dortoir à roubles, pince à sucres

l’écorce des anthologies forcenées monomaniaques, célébration du tout-venant, dissection du rien du tout, abécédaire des psaumes énamourés et des heures creuses, incunable mis à l’index et au doigt d’honneur, tapuscrit dyslexique et bible aphasique, vingt mille poèmes sous le ronéotype

lorsque je descends

          je participe à l’incendie de la bibliothèque
          j’assiste à la rescousse des mains jointes
          j’assiste la formule du nouveau roman
          je marie la constitution à l’iconoclaste

mercredi 6 avril 2016

lorsque je descends 2

lorsque je descends

le canal fluvial navigable de l’œsophage, parmi les crues des bourbes et des lies, dans la mangrove des orchidées et des lianes, au beau milieu du marigot des putréfactions, des pontes des mouches vertes

les poulies du pylore, agrippé aux filins des balustres, rincé des sucs perforants et chauds, démembré par les ressacs du diaphragme, cramé par les ulcères et les œdèmes, cramé puis noyé, noyé dans des jus d’astringence

dans les écluses de la veine cave supérieure, scaphandre balloté par les humeurs sombres, les idées de massacres et de conquêtes, nageur assommé par les radeaux en déroute, les humiliations compactées en pierres de taille, baigneur attardé dans les rétrécissements graisseux et grumeleux

lorsque je descends

          je participe à la destruction
          j’assiste au dépoitraillage
          j’assiste les amibes et les septicémies
          je marie la morve à la germination

lorsque je descends

vers la rébellion des tendons, effilochés d’efforts vains et répétés, disloqués de sautes de vent et des ressauts de la cognée, vers le dépiautage des nerfs usés, abusés, médusés, corridor des douleurs, paillasse des résignations

sous le démantèlement des cartilages, pistons ruinés de rouilles et d’acide, calcification des outrages, durcissement de l’âme et de l’affect, fragilisation des mortaises et des queues-d’ aigles, mutation du squelette vers l’armure et le bionique

dans la stratégie des ongles, couteaux multiples, pinces et palans, la coordination des lacérations purulentes, les écartèlements des plaies, les distorsions des organes annexes et sentinelles, la mise à plat de diagrammes de survie

lorsque je descends

          je participe aux transplants nécessaires
          j’assiste aux prolongations acharnées
          j’assiste l’anesthésiste et le vampire
          je marie le plasma et l’eucharistie 

vendredi 1 avril 2016

lorsque je descends

lorsque je descends

dans le trou du souffleur, où les rimes coupent à cœur le masque de l’ennui, où le faux-pas tranche le lard du cosmétique, où le rire gras décapite le parler local

agrippé à la corde du puits, vers les moisissures véridiques de l’inconfort, vers le frétillement des scolopendres scrofuleux, vers les chaînes ADN des crapauds multicolores, vers les enregistrements des vindictes populaires, vers la fermentation de l’ego

dans la fosse où se vautrent les barbares amputés, où geignent les proscrites des places publiques, où gesticulent les monstres éborgnés et ventrus de nos abominations, où dorment les animaux repus qui ont faussé compagnie

dans le siphon du diable, écorcheur de pivoines, écornifleur des âmes humaines en reddition, rhabilleur de poules pondeuses et de canes de Barbarie, relaveur de paletots d’archanges frelatés

lorsque je descends
        j’allonge le pas vers l’inconstance
        je perds la sensation du tout à l’avenant
        je gagne du terrain sur le vide
        je me joue des culbutes imbéciles

lorsque je descends
         
dans les rapines iconoclastes, où se mirent les fées bâtardes, où se calculent les héritages tirés au sort, où s’empilent les formulaires polycopiés de l’amour, où se délitent les sommeils du juste

dans les cavernes des justifications, attentistes des maldonnes et des falsifications, expertes en faux-fuyants et lâchetés, réceptacles rémissions placebo, fourre-tout des trahisons sublimes

dans la salle des machines des ersatz affolés, où grincent les cordages des optimistes, où crochent les mécanismes de l’oubli, où s’encodent les directives et les guides, où s’argumentent les segments des vanités

lorsque je descends
        je respire l’organisme non filtré
        je perds le lien aventurier
        je gagne la confiance du dé à coudre
        je me joue de mes frontières fissurées