1440 minutes

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editions d'autre part

dimanche 26 février 2012

le torrent charrie


nous sommes bien en peine
le torrent charrie ce qu’il charrie
par à-coups
par sautes d’humeur
le pan d’une soutane
un panier d’indulgences
la transhumance des troupeaux
les hommes qui s’exilent

la montagne retourne à la mer
les cailloux percutent l’âme d’Otzi
et la soupe du chalet


nous sommes bien en veine
le torrent charrie ce qu’il charrie
par rage
et par fou rire
le bréviaire des dimanches
une profession de foi
la fuite des bergères
et l’arrivée des barbares

le glacier pisse dans l’océan
le bouquetin remâche une démocratie
et la fondue moitié-moitié

26 février 2012

jeudi 23 février 2012

la ville déroule

à l’épaule un sac bourré d’insultes
et de prothèses de fin du monde
il traverse les places et les regards
il connait l’alphabet des princesses
et la mathématique des bulbes
on partage une bière et un poème forestier
on dessine une carte sur la nappe en plastique
on délivre la rue
je lui file un sourire
et lui une mauvaise dent

la ville s’inquiète des mauvaises manières
et des otages enfants
la fièvre se propage
et la révolte des tourterelles
un prière panique en cyrillique
la ville compte ses renards
et ses bouches d’égout


dans son sac à main des adresses de malfrats
une photographie de carnaval
de vieilles lires et des dollars faux
des confettis d’ecstasy
la clef du presbytère
elle s’habille à l’abattoir
des sanglots des bergères
sa peau est en caïman
son âme en baobab
elle attend le printemps
et moi l’amour en pétard

la ville déroule des fêtes et des tournois
le plus bel arlequin la plus vieille veuve
les fontaines à sirop et les wc chimiques
la femme miraculée et les solos de bugle
les moutons soixante-huit sur la place Panurge
la ville repeint son ciel
pour le passage de l’équinoxe

je décompte les heures
au tonneaux des rencontres

23 février 2012

dimanche 19 février 2012

je descends vers les silences

je descends vers les silences contrits
j’habite une pervenche malhabile
je comprendrai un jour
les cochenilles et les processionnaires
je dormirai aussi dans la pinède

je descends incognito dans la décrue
je cogne aux portes des verveines
je  comprendrai peut-être
la larve de la libellule et la laitance du crapaud sonneur
je dormirai dans les soutanes des chardons

je descends sous l’écorce
je détricote les pulsatiles
je comprendrai c’est sûr
l’itinéraire du capricorne et de la rosalie
je dormirai sous la couette des nénuphars

pour l’instant je descends le projet des campanules

19 février 2012


samedi 18 février 2012

un peu que le cerisier

un peu que le cerisier se demande
un peu que le chardonneret fiente
j’ai du carnaval dans les tympans
un acouphène de fête et de verres brisés
une révolution d’œuf ébréché

j’ai la solution délicate des lessives
j’ai la clef du tabernacle
j’ai la griffure du matin


un peu que le cerisier et son entrechat
un peu que le chardonneret et son théâtre
j’ai du chant d’amour dans les artères
un accord mineur et cinglé sur l’échine
une révolution de gingembre et d’épices

j’ai les abandons empaquetés
j’ai la couturière de la grand’ voile
j’ai la signature de midi

j’ai le paraphe de ta poitrine

18 février 2012

lundi 13 février 2012

ça vit tant que ça peut

ça descend le tropique
sur une castagnette
ça bivouaque les amours
dedans la grosse caisse
ça remue le ménage
des pattemouilles tristes
ça vit tant que ça peut
au comptoir des tavernes
je consigne de faux regrets
dans un buffet de garde-meubles

ça descend les moulins
dans la dérupe du trombone
ça couche dehors l’amertume
sur le clavier du blizzard
ça débusque à minuit
les saletés du sommeil
ça vit tant que ça peut
dans les tiroirs des merceries
je bas-de-laine un amour filial
dans le tiroir des bobinettes

ça descend le pavé noir
sur les clavettes des hautbois
ça tire la couverture
des mensonges distraits
ça frotte de paille-de-fer
les corridors des secrets familiaux
ça vit tant que ça peut
dans le missel des habitudes
je compile des airs grotesques
sur la boîte-à-musique des petits

ça descend la prairie jaune
sur la furie du cymbalum
ça s’allonge sous les jupes
des femelles en ribote
ça s’astique d’inconscience
les jarrets des rumbas
ça vit tant que ça peut
les nuits des fêtes païennes
je brade mes jambes de bois
à l’étal des farces et des mystères

13 février 2012

dimanche 12 février 2012

ça cogne aux portes

ça cogne aux portes
ça cogne aux volets clos

ouvre dégage respire
le bonheur est aujourd’hui
prends-le comme un pré de fauche
comme une corbeille de pommes reinettes
comme une brebis de tonte
le bonheur est aujourd’hui

demain seront les débâcles
les incendies
les floraisons
demain les étendards farouches
les vents de la taïga
et les loups malpropres


ça cogne à l’angélus
ça cogne à la cloche fidèle

ouvre éclate marche
le bonheur est aujourd’hui
prends-le comme une parade de busards
comme un lapin dépecé
comme un plongeur sous la glace
le bonheur c’est maintenant

après seront les chutes
les incendies
les débats amoureux
après les virus asiates
les perditions mégapoles
les directives d’état


ça cogne aux nouvelles
ça cogne aux banquets des familles

ouvre accueille respire
le bonheur c’est maintenant
prends-le comme un vin pétillant
comme un chant de seigle
comme le lucane sous l’écorce
le bonheur est ici

après seront les avalanches
les incendies
les pivoines gelées
après la pelle du fossoyeur
la reddition des braves
la fuite des renards


ça cogne
le bonheur est
prends-le comme un ciel de nuit
ouvre peins et jouis
ça cogne
vraiment



12 février 2012

mercredi 8 février 2012

on invente des méridiens

on invente des méridiens autistes
pour la bascule des rencontres
un transat rouge sous la pluie
le hall formica d’un hôtel sans étoile
le roc du faucon sous la glycine sauvage
la ruelle corridor qui ouvre sur la mer

on invente des méridiens blasphèmes
pour les lundis sous la couette
un hamac angora sous le figuier
le guichet plexiglas du bureau de change
le trou du prunelier pour le pinson distrait
la place aux pavés rouges qui parle l’italien

on invente des méridiens funambules
pour le vertige des caresses
une bergère de velours dans le boudoir
le guéridon de bois beige dans la salle d’attente
le tambour de bois mort pour le pic amoureux
le préau de la paroisse où fane la charité

on invente des méridiens aphones
pour les miracles d’orchestres
un lutrin de fer-blanc à jeter dans la fosse
le tabouret bakélite du chef régisseur
le perchoir pipeau de la gentille alouette
l’escalier du théâtre qui monte vers le glacier
 
on invente des méridiens sans limite
pour les aventures du désert
une natte de soie bleue dans la yourte plein vent
un autel de mollasse pour les dieux de fatigue
un fouillis de branches pour le bec-en-sabot
la margelle de pierres blanches où dorment les outres
 
8 février 2012

samedi 4 février 2012

quand la chambre s'arrête

quand la chambre s’arrête
au portail du risque
prends des nouvelles des confettis
de leur descendance dans le siècle
la musique est un peu grinçante
quand le chagrin remonte de l’acide
il manque une croche à ma savate
quand l’étoile est sous perfusion

quand la chambre s’arrête
à la porte de l’aventure
prends des nouvelles des nez-rouges
de leur épidémie de peste
la musique est un peu gargote
quand le destin recuit des vins madères
il manque une noire à ma bottine
quand l’étoile est sous dialyse

quand la chambre s’arrête
au seuil des habitudes
prends des nouvelles des ronds de bière
de leur brasserie génétique
la musique est un peu bancale
quand la promesse se fait la malle
il manque une blanche à mon sabot
quand l’étoile est sous oxygène

quand la chambre s’arrête
sur le rebord de l’abandon
prends des nouvelles des fanfarons
de leurs partitions mammifères
la musique est un peu syncope
quand le bon sens est biscornu
il manque une ronde à ma chaussure
quand l’étoile est dans le coma

4 février 2012